DEVOIR (notions de base)
Le devoir, une affirmation de la raison
Un siècle avant Nietzsche, Emmanuel Kant (1724-1804) avait dû admettre que la morale ne se prouve pas. Mais il complétait ce constat par l’idée suivante : si nous sommes dans l’illusion en supposant que nous menons nos existences d’après des principes que nous choisissons de suivre, si nous ne sommes que des êtres conditionnés ou des animaux-machines, c’est alors l’idée même de morale qui s’écroule.
Depuis que le monothéisme a introduit l’idée de responsabilité, tous les hommes ont présente à l’esprit l’idée qu’ils sont bien à l’origine de leurs actes, qu’ils ne sont ni des animaux, ni des machines, mais des êtres pensants que seule une décision intérieure fait agir. C’est dans le secret de notre conscience que se déroule la délibération dont résulte ma décision d’obéir ou de transgresser la « loi ». Nul n’a accès à cette « forteresse » sans laquelle je ne saurais me considérer comme un être moral. Il en résulte une conséquence majeure : je ne peux savoir avec certitude si autrui a agi moralement, c’est-à-dire par respect pour la loi, ou bien s’il a agi par peur des sanctions ou par intérêt personnel. Et il en est quasiment de même pour ce qui concerne la relation de moi-même avec moi-même. Les philosophes n’ont pas attendu Freud pour savoir à quel point l’homme est capable de se duper lui-même, de s’illusionner sur les vraies raisons de ses actes. Seul un Dieu pourrait nous juger, lisant à livre ouvert dans nos consciences et sachant avec certitude ce qui a vraiment motivé notre acte.
Il n’y a aucune autre façon de ressentir notre liberté que dans l’obéissance ou la désobéissance à la loi morale. Dans un monde sans lois, nous éprouverions probablement une belle spontanéité, mais en aucun cas notre liberté.
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Écrit par
- Philippe GRANAROLO : professeur agrégé de l'Université, docteur d'État ès lettres, professeur en classes préparatoires
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