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DIALECTES ET PATOIS

Le classement sociolinguistique

Langue commune

On appelle en général langues communes les idiomes adoptés comme langues officielles par un ou plusieurs pouvoirs politiques nationaux ; nous avons décrit ci-dessus leur statut. Un terme intermédiaire entre langue commune et dialecte est celui de langue de minorité : il s'applique aux cas semblables à ceux du breton ou du basque en France, qui ne sont pas apparentés à la langue du pouvoir national dont ils dépendent, mais lui sont politiquement subordonnés. Du fait de leur originalité linguistique, les langues de minorités résistent bien à l'assimilation, bien que leur statut oblige leurs usagers au bilinguisme dans les pays où l'enseignement de la langue nationale est obligatoire. Pourvues souvent d'une presse, d'une littérature et de quelques accès aux médias audio-visuels, ces langues abandonnent en général les domaines techniques à la langue nationale, mais parviennent à répondre pleinement aux besoins de leurs usagers pour la vie courante.

Dialectes

On distingue deux sortes de dialectes, ou plutôt deux emplois distincts du terme de dialecte : dans l'un, dialecte s'oppose à langue commune ; dans l'autre, la relation du dialecte à la langue est celle de la partie au tout. Le premier emploi est le plus traditionnel. Il désigne des parlers répandus sur d'assez vastes territoires à l'intérieur d'une unité politique dont la langue officielle est nettement distincte d'eux, bien que de même famille. Ces dialectes sont donc des langues régionales. Si la distinction entre la langue et les dialectes est claire par suite de la normalisation de la première, les limites entre les différents dialectes semblent souvent peu discernables par suite de leur parenté : si l'on trace les isoglosses repérant les lieux où des unités lexicales témoins changent de forme, on s'aperçoit qu'elles ne se recouvrent pas ; il faut donc recourir à un faisceau d'isoglosses, ou mieux à un ensemble systématique de faits qui visent moins à tracer des frontières qu'à définir deux réalités globalement distinctes. C'est ainsi que, dans l'ancienne France, des dialectes comme le picard, le normand ou le poitevin coexistaient avec le français, langue de même origine latine que ces dialectes et qui n'était elle-même qu'une langue régionale, parlée à Paris et dans la région parisienne, avant que l'unification politique de la France à partir de Paris ne lui confère le rôle de langue commune. Aujourd'hui encore, en Allemagne, à côté de la langue commune, le Hochdeutsch, on parle encore le bavarois ou le souabe ; en Italie, le napolitain ou le piémontais n'ont pas été totalement éliminés par l'ancien toscan devenu l'italien, tout comme, en Espagne, le catalan ou le galicien résistent aux ambitions du castillan promu langue espagnole. Dans tous ces cas, les dialectes et la langue ont connu antérieurement un statut d'égalité, et la langue nationale est d'abord la langue d'une région dont la population est donc, naturellement, unilingue. Mais il arrive que la langue officielle ne soit le parler vernaculaire d'aucune région et que tous les habitants aient un dialecte (ou une langue tout à fait différente) pour langue maternelle : par exemple, dans les pays ayant adopté l'arabe classique comme idiome officiel, toutes les populations emploient des formes d'arabe dialectal (ou sont berbérophones). Dans l'un et l'autre cas, l'intercompréhension entre langue et dialecte est souvent limitée ou nulle, et les locuteurs du dialecte sont obligatoirement bilingues, s'ils veulent participer à la vie nationale. Cependant, tant que l'ensemble des habitants de la région communiquent entre eux en dialecte dans la vie courante le dialecte garde son unité, car les divergences locales sont neutralisées et contenues de façon à permettre la compréhension ; il manifeste[...]

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Écrit par

  • : professeur des Universités, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, Paris

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