DIALOGUES DES CARMÉLITES (F. Poulenc)

Une musique au service du texte

Le livret de l’opéra est de Francis Poulenc, d’après les dialogues de Georges Bernanos. Excepté quelques légères coupures, le compositeur a respecté le texte original. L’œuvre demeure telle que l’écrivain l’a conçue. La forme adoptée rejette tout académisme et témoigne d’un art sans formules. Au-delà du texte, Poulenc n’a pas cherché à écraser de son talent de symphoniste l’œuvre de Bernanos mais plutôt à la servir. C’est donc le texte seul qui commande la musique. L’écriture vocale, qui n’est jamais étouffée par un orchestre trop puissant, se caractérise en effet par une souplesse et une liberté dont on trouve peu d’exemple dans l’histoire de l’opéra. Style récitatif et style lyrique se marient parfaitement. La musique épouse les moindres inflexions du texte. D’un bout à l’autre de l’œuvre, il existe une concordance intime entre la pulsation de la prosodie, la ligne mélodique qui l’exprime et le caractère des personnages.

Du récitatif à l’arioso, le compositeur utilise toutes les possibilités de la voix humaine, sans qu’il y ait jamais de rupture. C’est à la voix seule que sont confiés les thèmes mélodiques. L’orchestration, d’une grande variété dans la combinaison des instruments, est ainsi conçue en fonction de la tessiture vocale et n’étouffe jamais les mots.

La partition est dédiée « À la mémoire de ma Mère qui m’a révélé la musique, de Claude Debussy qui m’a donné le goût d’en écrire, de Claudio Monteverdi, Giuseppe Verdi, Modest Moussorgski, qui m’ont servi ici de modèles. »

Plus tard, Francis Poulenc ajoutera : « Dans Les Dialogues ce n’est que l’esprit de Monteverdi et de Moussorgsky qui me guident, et non leur musique, bien sûr ! [...] Je ne peux songer à étouffer les mots si chargés de sens de Bernanos sous une avalanche orchestrale. C’est pourquoi je songe sans cesse à Monteverdi, qu’une grande réserve instrumentale n’empêche pas d’être lyrique au maximum. »