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DIALOGUES INTÉRIEURS À LA PÉRIPHÉRIE (P. Handke) Fiche de lecture

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Dialogues intérieurs à la périphérie (traduit de l'allemand par Laurent Margantin, Verdier, 2024) est un ouvrage de l’écrivain, scénariste et réalisateur autrichien Peter Handke. Né en 1942 à Griffen, en Carinthie, couronné par le prix Georg-Büchner (1973), le prix Franz-Kafka (2009) et le prix Nobel de littérature (2019), Handke compose une œuvre en perpétuelle expansion, enchâssant romans, nouvelles, récits, pièces de théâtre, essais, poèmes et traductions, et bousculant les limites convenues de la littérature.

Les Dialogues intérieurs à la périphérie relèvent de l'autobiographie, de l'écriture fragmentaire héritée d'un Lichtenberg et de la tradition des grands moralistes français, tout en les transgressant. Tenus de 2016 jusqu'au 6 novembre 2021, ces carnets continuent la longue partition de notes prises chaque matin en marge de l’œuvre – laboratoire d'écriture en perpétuelle métamorphose – dont une partie seulement est publiée.

L’écriture du dehors

L'expérimentation a commencé avec Le Poids du monde (1980). Ce journalcomposé de novembre 1975 à mars 1977, daté au jour le jour, puis mois par mois, est le procès-verbal d'une conscience anonyme qui s'efforce de porter « le poids du monde » et d'en restituer la poésie. Elle se poursuit avec l'Histoire du crayon (1987), suite de notes sans date tenues de 1976 à 1980, et les Images du recommencement (1987) pour1980 à 1982, avant de se transformer en carnets avec À ma fenêtre le matin (2006) pour 1982 à 1987, puis Hier en chemin (2011) pour 1987 à juillet 1990. Les Dialogues intérieurs à la périphérie. 2016-2021 appartiennent donc àune période ultérieure : l'auteur vit près de Paris, séjourne dans sa maison de campagne en Picardie et, quasi silencieux sur le prix Nobel qu'il reçoit, prépare un roman, La Voleuse de fruits, un récit, La Deuxième Épée,et une pièce, Zdeněk Adamec, tandis que surviennent la pandémie de la Covid et le confinement.

Les Dialogues intérieurs à la périphérie,titre paradoxal a priori, désigne la nouvelle étape de cette odyssée journalière dont « les reflets » ne cessent de s'élargir de l'intime au dehors, en orbes concentriques. Peter Handke détourne le concept psychologique de « dialogue intérieur », thérapie brève qui vise à mieux se connaître, en donnant la parole aux voix contradictoires qui habitent notre identité. Ici, le « je » autobiographique éclate en une polyphonie de phrases qui laissent vibrer ses zones environnantes inconnues : « Toujours comme si mon âme se parlait/.../ Et qu'en elle des harmonies innées résonnaient, hors d'elle-même » (Prométhée, selon Goethe, ouvrant le premier fragment de l’ouvrage). Pour l’auteur qui se peint aussitôt après, avec ironie, en « vieux Prométhée […], assis sur un trône de coussins usés », cette soif d'« espaces ouverts » qui fait de l'écriture une spirale de délivrance, répondrait, selon la note suivante, à l'angoisse de l'enfermement, à « un épuisement à vie, ressenti » depuis l'internat « jusqu'à maintenant ».

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Écrit par

  • : professeur agrégé, docteur ès lettres, écrivain

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