DICTIONNAIRE
« Nouvelle lexicographie » et « Nouveaux dictionnaires »
Dans la seconde moitié du xxe siècle, le dictionnaire connaît d'importants développements. Les nouveaux rôles qu'il est appelé à jouer dans la société de l'information et de la communication renforcent l'intérêt qu'on lui portait jusque-là. Reconsidéré, son usage dans l'enseignement amène à produire des dictionnaires d'apprentissage d'un type nouveau, conçus comme compléments des grammaires scolaires. Deux innovations ont influencé les méthodes et modifié à la fois la forme et le contenu du dictionnaire, donc les services qu'il est appelé à rendre : la promotion de la métalexicographie ou étude scientifique de la lexicographie et des productions dictionnairiques, et les applications du traitement automatique de la langue à l'univers du dictionnaire.
Jusqu'en 1950, les pratiques lexicographiques, fondées sur des savoir- faire traditionnels, demeuraient empiriques pour l'essentiel, constituant un patrimoine d'expériences commun à plusieurs langues. Avant cette date, aucun écrit théorique ou manuel pratique ne leur avait été consacré, à l'exception des préfaces de dictionnaires, toujours trop succinctes, et de quelques essais philosophiques (tels ceux de d'Alembert au xviiie s.). C'est dire que, pendant cinq siècles, les dictionnaristes ont eu la charge d'enregistrer et d'expliquer « toute » la langue, donc de résoudre de manière pragmatique des problèmes que les linguistes ne concevront et ne formuleront que bien plus tard.
Aujourd'hui, le domaine du dictionnaire retient l'attention des lexicologues et des linguistes, il s'enrichit de travaux théoriques, historiques, critiques ; des réunions savantes et des périodiques spécialisés lui sont consacrés. Une distinction fonctionnelle entre deux concepts s'est imposée : « lexicographie », pour toutes les collectes et analyses des mots qui n'impliquent pas la réalisation d'un dictionnaire, et « dictionnairique », pour la recherche ou le travail consacrés à l'objet dictionnaire, toute dictionnairique réussie reposant sur une bonne lexicographie. Des spécialités comme la néologie et la terminologie, avec leur veille lexicale, alimentent le marché des données lexicographiques. En enrichissant les banques de mots et de termes, elles assistent les réalisateurs de dictionnaires de machines à l'usage des industries de la langue.
Les progrès de l'informatique éditoriale et des traitements automatiques de la langue et des textes ont bouleversé le travail des dictionnaristes autant que leurs produits dans les dernières années du xxe siècle. Ces transformations, plus profondes encore que celles entraînées par l'imprimerie, justifient les intitulés de « Nouvelle lexicographie » et de « Nouveaux dictionnaires ». Une relation directe associe les formules rédactionnelles à la composition et à la mise en page (choix typographiques, illustrations, couleur), de même qu'aux modes de diffusion, par impression, enregistrement numérisé sur CD-ROM, ou mise sur réseau télématique.
Tout « nouveau dictionnaire » se fonde sur une vaste documentation fournie par des bases textuelles et des banques de mots ou de termes dont les données sont tirées d'un grand nombre de sources numérisées ou recueillies dans les « bibliothèques virtuelles » sur Internet. L'insuffisance des sources a pu être un problème, maintenant il convient de maîtriser la profusion des données offertes. Mais pour composer la nomenclature, sélectionner les emplois, choisir et pondérer exemples ou citations, et analyser les constructions, rédiger et homogénéiser les définitions ou normaliser le métalangage, les rédacteurs disposent des logiciels appropriés. De véritables « stations lexicographiques » permettent d'accélérer[...]
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Écrit par
- Bernard QUEMADA : directeur de recherche émérite au C.N.R.S., directeur d'études honoraire à l'École pratique des hautes études
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Média
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