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DIEU La négation de Dieu

L'existence de Dieu

La notion ambiguë de possibilité sert d'intermédiaire entre l'essence et l'existence : puisque toutes les perfections sont compatibles, l'idée de Dieu n'enferme aucune contradiction, Dieu peut exister et, puisqu'il est Dieu, son pouvoir est son être ; possible, l'idée de Dieu ne l'est toutefois que si Dieu existe et sa possibilité engendre moins son existence que celle-ci n'engendre sa possibilité, car ses perfections ne seraient pas parfaites, elles manqueraient leur accomplissement si elles n'étaient pas comprises dans la plus haute de toutes, l'existence absolue ; la preuve de celle-ci est donc négative, contre-preuve et contre-épreuve qui ne suit pas le chemin du non-être à l'être – supposition sacrilège d'un néant qui précéderait Dieu – mais qui, s'installant délibérément dans l'Être rend évidente l'impossibilité de sa non-existence : s'il n'existait pas nécessairement, les êtres contingents ne pourraient pas exister ; s'il n'existait pas providentiellement, le hasard, le désordre et le chaos seraient la loi de l'absence de loi ; s'il n'existait pas comme il est compris dans le concept de la perfection absolue qu'il doit exister, nous ne le penserions pas. Principes de causalité, d'identité, de finalité, de non-contradiction soutiennent tour à tour l'impossibilité de la possibilité du néant et se renforcent les uns les autres, la non-contradiction excluant la déduction non conforme, l'identité appuyant la causalité et la finalité, pour que la conclusion réponde aux définitions de la cause et de la fin, qui soutiennent l'unité de l'identité et de la nécessité.

Il n'y a rien à objecter au jeu formel des notions quand on les accepte comme les lois de la pensée qui sont aussi les lois de l'être, quand on érige en principes les règles d'un certain discours, le discours positif, et qu'on oublie qu'une combinatoire ne produit qu'une ou des combinaisons. Du possible ne se tire que le possible, de ce deuxième un troisième, possible encore, réel comme possible mais non réel tout court ; que la chaîne se prolonge à l'infini ou qu'elle se contracte en instant éternel, elle ne livre que la possibilité du possible sans plus autoriser la chiquenaude qui la transformerait magiquement en être, que la déduction qui conclurait à l'impossibilité d'une non-existence, car l'existence et la non-existence d'une chose ne s'opposent pas plus en une proposition contradictoire qu'elles ne s'excluent entre elles : de l'idée de l'Être qui existe nécessairement ne se conçoit que l'existence nécessaire en idée, ce qui ne le fait pas exister ; la représentation de l'être parfait, fût-elle une idée parfaite, eût-elle la rigueur des notions mathématiques, est impuissante à engendrer son objet. Ainsi de l'idée de parfait ne se déduit que la notion d'un être qui pourrait être parfait s'il existait, qui implique la convergence de deux possibilités : celle de la possibilité interne du concept d'un tel être et celle de son existence, mais elles restent possibles et quant à la notion et quant à l'existence, rien dans la notion ne convertissant le devoir-être en être, rien dans l'affirmation ne répondant de la réalité de l'affirmé. Quant à l'absolu dont la nécessité procéderait de sa définition, il resterait à établir que l'existence absolue est aussi l'absolu de l'existence et qu'il ne fait qu'un avec le Parfait, l'Infini, l'Éternel ; mais si « absolu » se dit de ce qui n'entre dans aucune relation et qui n'est relatif à rien, même au relatif, il y a autant d'absolus qu'il y a d'incomparables – singularité des hommes et des œuvres sur laquelle achoppe tout genre et toute définition communs.[...]

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