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DING LING (1904-1986)

Jiang Bingzi (ou Bingzhi) est née en 1904 dans un village de la province du Hunan, d'une famille de noblesse terrienne illustre par ses lettrés et ses hauts fonctionnaires. Ding Ling a quatre ans lorsque son père meurt. Sa mère va lui donner les moyens d'assurer son indépendance ; elle l'emmène à la ville voisine, où la petite fille peut aller à l'école, puis l'envoie à Changsha, capitale du Hunan, pour qu'elle y suive des cours secondaires. Le Mouvement du 4-Mai (1919), antiféodal et anti-impérialiste, happe la jeune fille. En effet, l'annonce des clauses du traité de Versailles réveille un patriotisme fervent : depuis la moitié du xixe siècle, la Chine, maintenue par le gouvernement des Qing dans l'arriération économique et politique, est devenue un objet de convoitise pour tous les impérialismes étrangers et se voit dépouillée peu à peu de sa souveraineté par leurs armées et leurs gouvernements en place (« concessions »), installés par les « traités inégaux ». Ding Ling, persuadée qu'une littérature de langue moderne (on a, jusque-là, écrit en langue ancienne) peut sauver la patrie, se met à écrire, à l'exemple de Luxun, des nouvelles qu'elle publie dans le quotidien du Hunan, La Xiang. En 1921, elle est à Shanghai, où elle suit des cours de l'École populaire des femmes créée par le Parti communiste chinois. En 1922, elle fréquente l'université de Shanghai, puis part pour Beijing, attirée par sa fameuse université, Mais elle n'y est pas acceptée. Dans la capitale du Nord, elle mène une vie très marginale, jusqu'en 1925, date à laquelle elle rencontre Hu Yepin, un jeune poète à qui elle lie sa vie.

En 1927, au retour de l'expédition, victorieuse, menée par les armées alliées du Guomindang et du P.C.C. contre les forces féodales qui tenaient encore le Nord, le coup d'État de Jiang Jieshi (Tchiang Kai-chek) porte au pouvoir l'aile droite du Guomindang et déclenche une répression sanglante contre les communistes et les progressistes du pays tout entier.

Ding Ling ne se sauve du désespoir qu'en se mettant à écrire. Elle publie, en 1928, son premier recueil de nouvelles et le roman qui la rend aussitôt célèbre : Le Journal de mademoiselle Sophie (Shafei nüshide riji). Selon Maodun, elle y fait apparaître « une femme nouvelle, qui se révolte contre les souffrances de l'époque et les codes éthiques hérités du passé ».

La même année, Ding Ling et Hu Yepin regagnent Shanghai, où Luxun a regroupé autour de lui l'ensemble des écrivains de gauche, dont l'Association est fondée sous sa direction en 1930. Ding Ling anime avec Hu la revue Rouge et Noir. Mais, en janvier 1931, une rafle de la police anglaise arrête et livre à Tchiang Kai-chek une vingtaine de dirigeants du P.C.C., dont cinq jeunes écrivains de l'Association, qui sont exécutés vingt jours plus tard. Hu Yepin est du nombre. Ding Ling confie à sa mère son jeune fils et se lance dans l'action et dans l'écriture. Elle entre à l'Association, puis au P.C.C., anime la revue L'Étoile du Nord (Beidou), créée par Luxun, écrit entre autres choses un roman, L'Inondation (Shui, 1931), sur la misère des seize provinces de Chine ravagées par les inondations cette année-là. En 1933, elle est arrêtée et jetée en prison, soit à cause d'une nouvelle autobiographique trop hardie politiquement (La Mère), soit parce qu'elle est maintenant secrétaire du P.C.C. à l'Association des écrivains de gauche.

Luxun, qui la croit exécutée à son tour, consacre à sa mémoire un poème vibrant d'affection et de respect. Mais Ding Ling n'est pas morte : trois ans plus tard, elle s'échappe et gagne le Shaanxi, où, après la Longue Marche, les armées de Mao Zedong se préparent à une nouvelle étape du processus révolutionnaire.[...]

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure de jeunes filles, agrégée de l'Université (lettres), docteur d'État, professeur honoraire à l'université de Paris-VIII, département de littérature générale, domaine chinois

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