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DING YANYONG[TING YEN-YONG](1904-1978)

Les peintres chinois contemporains se trouvent dans une situation délicate. Certains, séduits par les techniques de la peinture à l'huile, ont trop bien réussi : leur succès les a placés définitivement dans l'orbite des écoles de Paris, de Londres ou de New York, et, si estimable que puisse être leur contribution artistique, elle ne relève plus de l'univers chinois. D'autres s'accrochent à la tradition chinoise, ignorant délibérément le défi du monde extérieur : ils peignent aussi bien que l'on peut espérer peindre quand on a choisi de fermer les yeux devant les réalités de son temps. Un grand nombre d'entre eux croient pouvoir éluder le dilemme en cultivant parallèlement peinture traditionnelle et peinture occidentale, mais ils en arrivent ainsi à un dédoublement de personnalité quasi schizophrénique. Parmi ces artistes également versés dans les deux disciplines, Ding Yanyong fait figure d'exception, présentant ce rare mérite d'avoir su animer sa double démarche d'une même impulsion spirituelle, d'un même rythme formel.

Peinture occidentale, peinture traditionnelle

Ding est né en 1904 au Guangdong, province périphérique qui a traditionnellement joui d'une plus grande autonomie, d'une plus large ouverture sur le monde extérieur, et fut donc un berceau de révolutionnaires et de non-conformistes. Comme beaucoup d'autres intellectuels de sa génération, c'est par l'intermédiaire du Japon qu'il découvrit l'Occident : il étudia la technique de la peinture à l'huile à l'académie de Tōkyō. Après un séjour de sept ans au Japon, il rentre en Chine en 1927. Jusqu'à la guerre, il enseigne la peinture dans les académies de Shanghai et de Canton. Il passe toute la durée de la guerre à Chongqing. Pour Ding, comme pour beaucoup d'artistes et d'écrivains habitués à la vie moderne et cosmopolite des grandes villes de la côte, cette soudaine immersion dans l'intérieur du pays, ce contact avec le vieux terroir provincial de la Chine marquèrent un tournant décisif. À la fascination de l'Occident succède alors pour les intellectuels une volonté patriotique d'affirmation de leur identité chinoise. Pour les peintres, cette évolution est encore plus manifeste que pour les écrivains, et cela pour des raisons bien concrètes : il n'est pas question de se procurer brosses, toiles et couleurs à l'huile au fond du Sichuan ; les artistes n'ont plus à leur disposition que ces instruments traditionnels de la peinture chinoise (pinceau calligraphique, encre, papier) desquels ils s'étaient jadis détournés, mais qui, dans le contexte de la guerre de résistance, leur paraissent désormais auréolés du prestige de la culture nationale. C'est en autodidacte que Ding s'initie alors à la peinture chinoise, par la pratique et la copie des anciens. Il n'abandonna plus jamais cette discipline, même après la victoire, quand il reprit parallèlement la pratique de la peinture à l'huile. Après la victoire, il s'installe à Canton où il devient directeur de l'école provinciale des beaux-arts. En 1949, il gagne Hong Kong et participe, en 1957, à la fondation du département des Beaux-Arts du New Asia College qui s'intégrera en 1963 à la nouvelle université chinoise de Hong Kong. Il y enseigne jusqu'en juillet 1978 et meurt le 23 décembre de la même année.

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Écrit par

  • : reader, Department of Chinese, Australian National University

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