GRANDI DINO (1895-1988)
Né le 4 juin 1895 à Mordano dans cette basse vallée du Pô périodiquement agitée d'âpres conflits sociaux, Dino Grandi appartient à une petite bourgeoisie (son père est agriculteur, sa mère institutrice) avide de promotion. Nationaliste, il s'engage dès la déclaration de la guerre qu'il termine avec le grade de commandant et plusieurs décorations. Jeune avocat à Bologne, il dirige un journal, L'Assaut, qui diffuse une idéologie confuse, mi-d'annunzienne mi-socialisante, et surtout organise les premiers « faisceaux » (fasci) qui, pour le compte des grands propriétaires terriens, entreprennent de détruire les nombreuses et actives organisations ouvrières. L'assaut contre la Bourse du travail de Bologne en 1920, qui fait neuf morts, est un des principaux épisodes de ce squadrisme agraire qui s'étend bientôt à toute l'Italie centrale. Dans son fief de Bologne, Dino Grandi échappe à l'autorité de Mussolini dont il critique ouvertement les tentatives de parlementarisation du mouvement et la signature d'un pacte de conciliation avec les socialistes.
Il faudra la création, le 9 novembre 1921, d'un Parti national fasciste centralisé pour mettre fin à la fronde des « ras » locaux.
Membre de la direction du parti, Grandi, qui est un des promoteurs de la marche sur Rome, va devenir un des principaux personnages de l'État fasciste. Élu député le 2 mai 1924 et vice-président de la Chambre, il entre au gouvernement comme secrétaire d'État à l'Intérieur.
Mais c'est au ministère des Affaires étrangères que se déroulera l'essentiel de sa carrière : secrétaire d'État de 1925 à 1929, ministre (à 34 ans) de 1929 à 1932, ambassadeur à Londres de 1932 à 1939. Oubliant le radicalisme de sa jeunesse, il s'efforce, avec succès, de donner une image modérée du régime qu'il représente. Partisan d'une entente avec la France et la Grande-Bretagne, hostile à l'Anschluss, son adhésion, sans autorisation préalable de Mussolini, au plan Hoover de désarmement lui coûtera son poste de ministre. À Londres, où il est apprécié, il s'efforce de limiter les dégâts causés par la guerre d'Éthiopie. Rentré à Rome comme ministre de la Justice et président de la Chambre des faisceaux et des corporations en 1940, il se prononce pour une neutralité italienne que la signature du pacte d'Acier, contre laquelle il ne s'est pas élevé, rend bien difficile. Dès 1941 se constitue autour de lui une opposition à la guerre, renforcée par les désastres militaires et qui devient, après la malheureuse entrevue Hitler-Mussolini à Feltre, une opposition au Duce. Dans la nuit du 24 au 25 juillet 1943, en accord avec plusieurs dignitaires du régime et surtout avec la Cour, Grandi saisit l'occasion de la réunion du Grand Conseil fasciste pour présenter une motion réclamant le rétablissement immédiat du roi dans toutes ses fonctions et la fin de la dictature mussolinienne. Votée par dix-neuf voix contre sept, la motion Grandi est le prétexte constitutionnel qui permet le lendemain au souverain d'éliminer le Duce. La chute du fascisme met fin à sa carrière politique. En s'exilant dès août 1943 au Portugal, puis au Brésil, il échappe à la condamnation à mort prononcée contre lui par le tribunal de Vérone. Rentré en Italie dans les années 1960, il crée une entreprise agricole modèle à Albareto, près de Modène, consacrant ses dernières années à la rédaction de ses Mémoires. C'est là qu'il meurt le 23 mai 1988.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Geneviève BIBES : docteur en science politique
Classification
Autres références
-
MUSSOLINI BENITO (1883-1945)
- Écrit par Pierre MILZA
- 3 772 mots
- 6 médias
...souhaitent faire sortir leur pays de la guerre, ont pris contact avec les Alliés et mis au point un scénario obligeant le Duce à abandonner le pouvoir. À l'issue d'une séance dramatique qui se prolonge tard dans la nuit, l'ordre du jour présenté par Dino Grandi, qui exige l'abolition...