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COORNHERT DIRK VOLKERTSZOON (1522-1590)

Polémiste, écrivain, graveur et humaniste, Dirk Coornhert compte parmi les principaux représentants de la Renaissance en Hollande. Versatile et courageux, dans un pays où l'intransigeance protestante succédait à l'intolérance catholique, il mena, en dépit des persécutions, un incessant combat pour la liberté religieuse et s'opposa aux exécutions pour fait d'hérésie. Précurseur de la libre-pensée, il laisse à chacun le soin de s'en remettre à sa conscience et fonde la morale laïque sur le respect d'autrui et un certain stoïcisme. Sa croyance en une perfection accessible à l'homme l'a fait taxer de pélagianisme.

Né à Amsterdam, il est éduqué dans la foi catholique, qu'il n'abjura jamais, même sous le pouvoir orangiste, mais dont il s'attachera surtout à garder les principes évangéliques. Il voyage en Espagne, au Portugal, se familiarise avec l'exégèse biblique, apprend la musique et la gravure. De retour à Amsterdam, il se marie en 1540 et s'installe à Haarlem, où il exerce la profession de graveur. Vers 1544, il découvre les œuvres de Luther, de Calvin et de Menno Simons. En 1550, il écrit sa Comedie van de rijcke man et traduit peu après le De consolatione philosophiae de Boèce. Il fréquente Hendrik Niclaes, le fondateur de la Famille d'amour, avec qui il se brouillera plus tard, mais dont il semble avoir partagé les espérances d'un retour à une communauté originelle idyllique. Il s'enthousiasme, par ailleurs, pour Sébastien Franck et les fragments mystiques de la Deutsche Theologie, dus à Hans Denck. En 1560, il s'en prend à Calvin et à Menno. Deux ans plus tard, Calvin lancera contre lui sa Réponse à un certain Hollandois lequel sous ombre de faire les chrestiens tout spirituels leur permet de polluer leur corps en toutes idolâtries, et à la suite d'autres textes de Coornhert sur le libre-arbitre, mettra en garde contre « cet homme qui pousse l'impiété à l'extrême ».

Notaire auprès de la cour de Hollande, Coornhert réussit à se rendre suspect aux catholiques comme aux réformés. À la suite d'émeutes iconoclastes, où son rôle n'est pas clairement établi, il est emprisonné en 1567 à La Haye. Il profite de sa détention pour écrire pièces et pamphlets, s'échappe en 1568 et joue jusqu'en 1572 le rôle d'agent secret du prince d'Orange, en dépit de l'hostilité des protestants. De retour à Haarlem et chargé d'un rapport sur les « gueux » dirigés par Lumey, il dénonce leurs brutalités et leurs exactions et s'attire leur haine. Il se cache à Leyde puis à Xanten. Lorsque Requesens, gouverneur des Pays-Bas, accorde un pardon général en 1574, Coornhert en est exclu. Il n'hésite pas alors à s'adresser à Philippe II dans l'espoir de recouvrer ses biens confisqués. De là vient la réputation qui lui a été faite de « manger à tous les râteliers ».

Quand il rentre en Hollande, l'hostilité des réformés s'est accrue à son égard et il ne fait rien pour l'atténuer. Il prend la défense de la minorité catholique opprimée en Hollande, multiplie les appels à la tolérance, se prononce contre la peine de mort appliquée aux dissidents de tous bords, traduit Sébastien Castellion. Il semble qu'il n'ait dû qu'à l'influence de Guillaume d'Orange de n'être pas condamné à la prison à vie. Chassé de Haarlem en 1585, il part pour Emden, où il publie en 1586 un ouvrage d'inspiration stoïcienne, Zedekunst dat is Wellevenskunste. Banni de Delft après un séjour de trois mois, il part pour Gouda et y meurt le 29 octobre 1590.

En lui s'opère le passage de la morale chrétienne à la morale laïque, enrichie des idées de tolérance et de liberté d'esprit. L'influence sur lui des mystiques et de Denck se traduit dans un langage dépouillé de sa[...]

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