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VOCALE DISTRIBUTION

La virtuosité vocale

Depuis toujours les chanteurs ont cherché à briller par la démonstration de leurs capacités techniques. Mais les critères d'appréciation de ces capacités ont varié selon les époques et les cultures. Dans l'Occident des temps modernes, c'est l'opéra qui fut le cadre privilégié où se déploya la virtuosité vocale, même si cette dernière se manifesta également dans d'autres domaines : la musique d'église, la musique de chambre, mais aussi la musique de tradition populaire.

La virtuosité dissimulée

Aux tout débuts de l'opéra, il était de bon goût que le virtuose donne à ses exécutions une apparence de facilité et de désinvolture (sprezzatura), afin d'en accroître l'effet. Dans la Préface d'Euridice (1600) de Jacopo Peri, l'un des deux premiers opéras dont la musique ait été conservée, le compositeur et chanteur Giulio Caccini évoque cette sprezzatura del canto comme l'une des caractéristiques essentielles du nouveau style dramatique : « Dans cette manière de chanter, j'ai fait usage d'une certaine sprezzatura, dont j'estimais qu'elle tenait du noble. » Il reprenait en fait un concept forgé par Baldassarre Castiglione, qui, dans son célèbre Livre du courtisan (Libro del cortegiano, Venise, 1528), définit ainsi l'art véritable : « Il faut fuir, autant qu'il est possible, l'affectation, et, pour employer peut-être un mot nouveau, faire preuve en toute chose d'une certaine sprezzatura, qui cache l'art [...]. Pour cette raison, on peut dire que le véritable art est celui qui ne paraît pas être de l'art, et on doit par-dessus tout s'efforcer de le cacher, car, s'il est découvert, il ôte entièrement le crédit et fait que l'on est peu estimé. »

La virtuosité triomphante

L'ouverture à Venise de théâtres lyriques publics et payants, à partir de 1637, modifia cette attitude. La fin de l'appartenance exclusive des chanteurs aux cénacles aristocratiques ou ecclésiastiques, l'importance grandissante des préoccupations commerciales, la nécessité vitale du succès et le développement d'un véritable star system rendirent la virtuosité de plus en plus démonstrative : on la cultiva avec ferveur comme une fin en soi. D'où l'invention, dès la seconde moitié du xviie siècle, d'une forme d'air d'opéra pour servir d'écrin à l'épanouissement de cette virtuosité, l'aria da capo, une structure tripartite où la fin est une reprise du début (da capo, en italien) destinée à être ornée par le chanteur de variations dont il décide lui-même. Comme l'expliquait le célèbre castrat Pier Francesco Tosi dans son Art du chant (Opinioni de' cantori antichi e moderni, Bologne, 1723) : « Dans la première partie, les airs ne demandent que des ornements simples, de bon goût et peu nombreux, afin que la composition reste intacte ; dans la seconde partie, ils exigent qu'à cette ingénieuse pureté s'ajoute un artifice original qui fasse reconnaître la grande habileté du chanteur ; ajoutons qu'en reprenant les airs da capo, le vocaliste qui ne varie pas tout ce qu'il chante, en y apportant des améliorations, n'est pas un grand artiste. »

Les règles de l'art

La virtuosité vocale se manifeste suivant cinq critères techniques principaux : la vélocité, la souplesse, la puissance, l'étendue et l'élocution. Auxquels il faut ajouter une notion complémentaire, et cependant essentielle : celle du goût propre à chaque style, variable suivant les nations, les époques et les esthétiques. C'est cette notion de goût que de nombreux théoriciens du chant mettent en exergue dans leurs traités : « Il ne suffit pas, pour mériter le titre de chanteur, de savoir chanter tel quel tout ce qui existe, mais en plus d'une bonne[...]

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Écrit par

  • : professeur au Conservatoire de Bourg-la-Reine
  • : professeur d'analyse et de culture musicale à l'École nationale de musique de Montbéliard et au Conservatoire national supérieur de musique de Paris

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