DJ (disc-jockey)
Le DJ à l’origine du rap
Le Jamaïcain DJ Kool Herc déménage en 1967 à New York et n’est encore qu’un adolescent lorsqu’il organise son premier sound system. Au début, il diffuse principalement du reggae et d’autres musiques de son île natale, puis enrichit sa sélection de funk ou d’autres musiques appréciées de son public. Il importe de Jamaïque les interventions parlées sur les morceaux, un goût prononcé pour les basses puissantes et l'utilisation d'une chambre d'écho pour créer des effets. Comme d’autres DJ de l’époque, il remarque que les danseurs affectionnent particulièrement certains passages des morceaux, généralement les parties instrumentales pendant lesquelles la rythmique est plus marquée. Lors d'une soirée d'août 1973, DJ Kool Herc tente d'enchaîner ces extraits, appelés breaks,plutôt que de jouer les disques les uns après les autres. Il puise notamment dans des morceaux de James Brown, des Isley Brothers ou de Incredible Bongo Band. La technique d’enchaînement est encore rudimentaire, le DJ glissant simplement quelques mots à l'assistance lors des transitions. DJ Kool Herc réserve dès lors chaque soir une séquence pour se concentrer sur ces extraits très rythmés. De plus, il commence à acheter ses disques en double pour pouvoir répéter ces passages en passant d'une platine à l'autre. Ce procédé, qui consiste à mettre en boucle un extrait d’un morceau, constitue la base du rap. Un an plus tard, le Jamaïcain joue dans tous les clubs du Bronx et organise surtout des fêtes en plein air, les Block Party. Il s'adjoint le service de plusieurs animateurs au micro pour pouvoir se concentrer sur le mixage.
La technique de DJ Kool Herc est perfectionnée par un autre habitant du Bronx, Grandmaster Flash, qui choisit de porter le plus grand soin à l'enchaînement entre les breaks. Il combine le concept de répétition avec la qualité de mixage que lui inspire un des meilleurs DJ disco de l'époque et son mentor : Pete Jones. Ce dernier rallonge les morceaux en enchaînant deux exemplaires du même disque. Il ne fait pas de courtes boucles comme Kool DJ Herc, mais répète de longs extraits de titres. Grandmaster Flash s’inspire de ces techniques de mixage et cherche à harmoniser les tempos des morceaux pour ne pas rompre le rythme cher aux danseurs. Il innove également avec la technique du back spinning, qui consiste en un retour en arrière rapide d’un extrait, sans changement de rythme. À partir de 1976, deux ans après ses premières performances dans le parc du Bronx, ses apparitions avec les Furious Five au micro attirent les foules.
Le troisième DJ à avoir fortement contribué à la création du rap est Afrika Bambaataa. Le fondateur new-yorkais de l'Universal Zulu Nation, mouvement consistant à promouvoir la culture hip-hop comme une alternative pacifiste à la violence des gangs qui contrôlent les quartiers pauvres de New York, officie pour la première fois en novembre 1976 au Bronx River Community Center. Il se démarque de ses prédécesseurs par ses qualités de « chasseur de disques ; il sera d'ailleurs surnommé le Master of Records ». Il n’utilise pas seulement des disques de funk ou de disco, mais recherche tous les morceaux dont même un court passage peut plaire aux danseurs. Il ouvre ainsi son public à d’autres cultures musicales : rock, jazz, etc.
Les DJ de l'époque se refusent à enregistrer en studio, car ils ne voient pas comment transmettre l'énergie des Block Party sur disque. Des enregistrements de leurs performances circulent toutefois : les mixtapes, cassettes pirates qui passent de main en main et popularisent leur style. Ce sont les producteurs de Sugar Hill Records qui signeront le premier titre enregistré de ce style avec le tube Rapper’sDelight (1979), qui reprend la ligne de basse de Good Times du groupe de funk Chic.[...]
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Écrit par
- Raphaël RICHARD : auteur et journaliste
Classification
Médias
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