Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

WATSON DOC (1923-2012)

Rien ne semblait destiner Arthel Lane Watson (né le 3 mars 1923 près de Deep Gap, en Caroline du Nord) à devenir un « gourou » du mouvement folk ni l'inspirateur d'une vaste école de guitare acoustique, aujourd'hui plus fournie que jamais. En effet, ce magnifique chanteur-guitariste aveugle résidant dans une région montagnarde reculée a longtemps végété dans de petits orchestres locaux, jouant à la guitare électrique les tubes de l'époque. C'est le musicologue Ralph Rinzler qui, en 1960, alors qu'il était à la recherche de Clarence Ashley, un artiste légendaire des années 1920 (le premier à avoir enregistré le thème House of the Rising Sun), rencontre l'un de ses parents, Arthel Lane Watson. Rinzler découvre que Watson est lui aussi un formidable banjoïste, guitariste et harmoniciste, doté d'un énorme répertoire qui couvre toute l'histoire de la country music, des premiers folksongs jusqu'au rockabilly.

Grâce à Rinzler, Clarence Ashley joue à Washington puis à New York avec d'autres musiciens folk de son voisinage, parmi lesquels Watson, qui, par sa dextérité à la guitare, sa voix chaude et sa personnalité charismatique, lui vole la vedette. Rinzler enregistre alors Arthel Watson, rebaptisé « Doc » dans les studios en clin d'œil au célèbre personnage de Conan Doyle. En 1963, Doc Watson est devenu un personnage obligé des festivals folk. Il signe un contrat avec le prestigieux label Vanguard, pour lequel il enregistrera plusieurs albums à succès dans lesquels il interprète avec profondeur et authenticité les folksongs les plus célèbres. Mais c'est surtout en tant que guitariste acoustique que Watson marque son auditoire, alors essentiellement composé de jeunes Yankees qui ne connaissent les traditions sudistes que par des copies nordistes souvent bien pâles. Doc Watson est excellent en fingerpicking mais encore meilleur en flatpicking, note par note au médiator. Il s'inscrit en fait dans la lignée de ses influences – Merle Travis, The Delmore Brothers, Hank Garland et Joe Maphis –, qui ont adapté à la guitare, avec une dextérité, une précision et un feeling incomparables, le jeu de fiddle traditionnel des musiques sudistes.

L'énorme succès de Doc Watson hors du terroir traditionnel de la country music – dans le nord des États-Unis, en Europe, au Japon, en Australie... – a influencé toute une génération de guitaristes, en particulier dans le bluegrass (Tony Rice, Dan Crary, Norman Blake...), un genre auquel il est quelque peu abusivement associé. À partir de 1965, Doc Watson se produit en tandem avec son fils Merle, lui aussi un splendide guitariste, notamment au slide. Ils enregistrent ensemble nombre d'albums, s'éloignant des folksongs pour une country music acoustique personnelle, sensible et virtuose. Merle Watson meurt malheureusement dans un accident de tracteur en 1985. Doc Watson continuera à se produire – parfois avec son petit-fils Richard – et à enregistrer, acquérant, autant par sa musique que par sa personnalité pleine de simplicité et de bon sens, la stature d'un patriarche vénéré. Il reçoit en 2004 un Grammy Award pour l'ensemble de sa carrière. Il meurt le 29 mai 2012 à l’âge de quatre-vingt-neuf ans.

Le coffret Doc Watson. The Vanguard Years (Vanguard) résume la première partie de sa carrière. Portrait (Sugar Hill) et Pickin' the Blues, par Doc et Merle Watson (Flying Fish), ainsi que l'album instrumental Guitar Album (Flying Fish) sont particulièrement réussis.

— Gérard HERZHAFT

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification