DOLLAR
La naissance d'une monnaie nationale
La Constitution des États-Unis (1787), dans son article 1er, section 8, confirme l'attribution au Congrès du droit exclusif de frapper des pièces de monnaie et d'en réguler la valeur. Ce droit sera ultérieurement interprété de manière plus extensive comme le pouvoir de déléguer le droit d'émission de toute forme de monnaie légale, billets, bons ou certificats, à des agences publiques placées sous l'autorité du Trésor fédéral.
L'émission de papier-monnaie à cours forcé, à part un bref épisode pendant la deuxième guerre d'Indépendance en 1812, reste interdite aussi bien à l'État fédéral qu'aux États. En revanche, les banques à charte d'État ou à charte fédérale reçoivent le droit d'émettre de la monnaie en billets (ou en dépôts) convertibles, c'est-à-dire remboursables à première demande en espèces métalliques.
L'instabilité des monnaies métalliques
Le bimétallisme (1792-1834)
Le premier régime monétaire légal des États-Unis est institué en 1792 par le Coinage Act (loi sur le monnayage). L'influence d'Alexander Hamilton, le premier secrétaire au Trésor, est prépondérante. Il instaure un système bimétalliste or et argent. L'unité monétaire est le dollar. Le Congrès fait du dollar l'unité de compte et choisit le système métrique pour l'expression de ses multiples et de ses subdivisions. En revanche, les poids et les titres des alliages métalliques se comptent en anciennes unités. Le prix du dollar est fixé en argent et en or à un taux fixe égal, soit à 371,25 grains d'argent fin, soit à 24,75 grains d'or pur. De manière équivalente, comme l'once comporte 480 grains, 1 dollar pèse soit 0,773 4 onces d'argent, soit 0,051 56 onces d'or. Le rapport légal de l'argent à l'or ressortit ainsi à 15 pour 1 (puisque 371,25 : 24,75 = 15).
La frappe des pièces à l'hôtel des Monnaies (The Mint, la Monnaie de Philadelphie créée en 1794) est libre et sans frais. Le département du Trésor du gouvernement fédéral est chargé de la réglementation et de la surveillance de la Monnaie.
À l'époque, toutefois, dans les régimes monétaires de l'étranger, le rapport d'échange entre l'or et l'argent est plus proche de 15,5 que de 15 pour 1. Ainsi, d'entrée, le Congrès sous-évalue l'or et surévalue l'argent. Les dollars d'argent frappés à la Monnaie de Philadelphie n'ont pas une très large diffusion dans les États de l'Union. Dans les îles de la Caraïbe, dollars américains et dollars espagnols s'échangent à 1 pour 1 et sont acceptés indifféremment dans les paiements. Mais, comme les dollars espagnols contiennent plus d'argent fin que les dollars américains, il se développe rapidement un trafic profitable sur la base d'un arbitrage simple : acheter des dollars espagnols au pair nominal de 1 pour 1 avec des dollars américains, faire fondre ces dollars espagnols et frapper des dollars américains à la Monnaie de Philadelphie ; ramener ces dollars américains à la Caraïbe et recommencer, sans fin, l'opération.
L'or, sous-évalué, disparaît de la circulation monétaire aux États-Unis et part vers l'étranger. L'argent, surévalué, afflue de l'étranger sous forme de dollars « lourds » espagnols tandis que les dollars « légers » américains quittent le pays. Bien que légalement en régime bimétalliste, les États-Unis se trouvent en fait en système monométalliste argent.
Le monométallisme or (1834-1861)
De 1834 à 1861, la situation se renverse et les États-Unis passent de facto à un régime monométalliste or. En fait, le Congrès espère obtenir un fonctionnement plus harmonieux du bimétallisme en ajustant le rapport légal entre l'argent et l'or. Le dollar argent[...]
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Écrit par
- Dominique LACOUE-LABARTHE : professeur de sciences économiques à l'université de Bordeaux-IV-Montesquieu, directeur du Groupe de recherche en analyse et politique économiques, unité mixte du C.N.R.S. 5113
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Médias
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