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DOMESTICATION

Les déterminants de la domestication

Dans le prolongement de l'analyse des traces matérielles laissées par la domestication, les archéologues n'ont eu de cesse de s'interroger sur ses déterminants et ses modalités. Un premier courant, qui refait surface aujourd'hui, a proposé d'y voir une réponse à une raréfaction des ressources disponibles consécutive à une dégradation climatique (G. Childe, 1954) et/ou à un accroissement démographique (L. Binford, 1983). Entre-temps, dans les années 1960, l'idée d'une « abondance » créée par la domestication a été remise en cause (M. Sahlins, 1972) ; il n'en restait pas moins que, pour passer à l'agriculture, il fallait y avoir été contraint (R. Lee & L. De Vore, 1968).

À ces hypothèses utilitaristes, pour lesquelles l'enjeu de la domestication est de résoudre des problèmes alimentaires, se sont opposées des hypothèses purement religieuses – domestication du bœuf et du coq (E. Hahn, 1896 ; C. O. Sauer, 1969) – ou mêlant rite et plaisir, par exemple pour le tabac ou le chanvre, dont la domestication est antérieure à celle du maïs et du blé.

Même si la portée de telles hypothèses reste faible, il ne faut pas en conclure que la domestication n'aurait toujours et partout répondu qu'à des considérations utilitaires. Au contraire, il y a tout lieu de penser que l'homme n'a pas d'emblée domestiqué des animaux dans l'intention d'en tirer des services ou des produits matériels, pour la simple raison que ces derniers n'existaient pas avant la domestication, mais qu'ils en furent le résultat à plus ou moins long terme. Ainsi, la fourniture de viande étant acquise, les hommes du Néolithique ne pouvaient pas prévoir que le mouflon fournirait de la laine, ni que la vache pourrait produire plus de lait que n'en réclamait son veau, ni, a fortiori, que le cheval serait appelé à jouer un rôle économique et militaire de premier plan. Les premières domestications ont probablement été guidées, avant tout, par deux tendances inscrites dans la nature de l'homme : d'une part, la curiosité intellectuelle gratuite, le besoin de relever des défis, de réussir du jamais vu, de venir à bout de ce qui échappe, indépendamment de toute nécessité ; d'autre part, le désir de dominer les êtres et la nature, de se les approprier et d'agir sur eux.

Pour les premières domestications et la naissance de l'agriculture au Proche-Orient, une hypothèse « psycho-culturelle » particulièrement intéressante a été avancée par J. Cauvin (1994) : l'invention de l'agriculture aurait été précédée, au Khiamien (entre 10 000 et 9 000 av. J.-C.), par une période de maturation culturelle préalable, appelée « révolution des symboles », qui était perceptible notamment dans l'architecture (maisons rondes construites en surface) et dans l'art funéraire (statuaire en argile durcie au feu dominée par la représentation anthropomorphe d'entités surnaturelles et par des crânes d'ancêtres surmodelés). Les Khiamiens ne pratiquèrent donc pas eux-mêmes l'agriculture et l'élevage mais ils fournirent le « milieu intérieur » d'où leurs héritiers, les Natoufiens, à partir de 9 000 avant J.-C., feront naître et se développer ces deux activités. Alors que l'attitude antérieure était plutôt de se tenir à une distance prudente de l'aurochs, le « peuple du taureau » va désormais affronter la bête et trouver ainsi l'occasion d'éprouver sa maîtrise de soi, son courage et son efficacité combative. La « révolution des symboles » a donc eu pour particularité essentielle de déboucher sur une nouvelle attitude envers l'environnement, non plus passive mais active, centrée à la fois sur la vie concrète et sur son renouvellement.[...]

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Domestication : berceaux des premières plantes - crédits : Encyclopædia Universalis France

Domestication : berceaux des premières plantes

Domestication des animaux : les espèces réputées domestiques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Domestication des animaux : les espèces réputées domestiques

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