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AURY DOMINIQUE (1907-1998)

Anne Desclos est née le 23 septembre 1907. Elle est morte le 26 avril 1998. Connue dans le monde entier sous le pseudonyme de Pauline Réage, auteur d'Histoire d'O, c'est sous celui de Dominique Aury que cette femme secrète devint l'une des figures importantes de la vie littéraire française, durant plus d'un demi-siècle.

Fille d'un professeur d'anglais, Auguste Desclos, diplômée de l'Université, en Lettres, Dominique Aury enseigne le français à des étudiants américains entre 1933 et 1939. Ses premiers pas dans la vie littéraire, c'est dans de petites revues dissidentes de l'Action française (Combat et L'Insurgé) qu'elle les accomplit, au côté de Thierry Maulnier. Elle fréquente là ses contemporains Claude Roy et Maurice Blanchot. Juste avant la guerre, elle rencontre Georges Adam qui, après la défaite de 1940, est l'un des fondateurs des Lettres françaises clandestines. C'est alors que son destin bascule. En effet, chargée de distribuer le journal, elle rencontre Jean Paulhan, ignorant que l'ancien directeur de La Nouvelle Revue française était, lui aussi, l'un de ses fondateurs. Employée à la commission de contrôle du papier, elle travaille aussi à une Anthologie de le poésie religieuse française, qui paraît chez Gallimard en 1943.

À la Libération, Dominique Aury est journaliste aux Lettres françaises, et commence sa carrière dans l'édition : d'abord secrétaire de rédaction de L'Arche, la revue de Jean Amrouche aux éditions algéroises Charlot (elle se lie alors avec Camus, Jules Roy), elle remplit ensuite des fonctions identiques aux Cahiers de la Pléiade, la revue de Jean Paulhan, de 1946 à 1952. Elle entre au comité de lecture des éditions Gallimard en 1950, puis elle est chargée du secrétariat général de La Nouvelle N.R.F. à partir de 1953. Parallèlement, elle dirige une collection de textes classiques aux éditions suisses de la Guilde du Livre. Les préfaces qu'elle rédige à cette occasion sont rassemblées en 1958, dans Lecture pour tous, chez Gallimard, livre couronné par le grand prix de la Critique littéraire. Fréquentant avec assiduité le salon de Florence Gould, à Paris ou à Juan-les-Pins, Dominique Aury siège aussi dans nombre de jurys littéraires : prix des Critiques en 1948, prix Paul-Valéry en 1950, prix international Formentor en 1965. Surtout, elle est membre du jury du prix Fémina à partir de 1963.

Cette fine observatrice de la psychologie humaine aurait sans doute écrit un livre de souvenirs d'un grand intérêt. Mais elle préfère exercer son talent dans de nombreuses préfaces et traductions, parmi lesquelles celles du Zéro et l'infini de Koestler, ou des Confessions du pécheur justifié de James Hoog. Sa dernière participation dans La Nouvelle Revue française, en juillet-août 1993, fut sa traduction, la première en français, de Cath-Loda d'Ossian.

Avant 1994, Dominique Aury n'avoua jamais publiquement qu'elle était l'auteur d'Histoire d'O, qui paraît en 1954 avec une préface du destinataire de cette « lettre d'amour », Jean Paulhan : « Du bonheur dans l'esclavage ». Dans Une fille amoureuse, préambule à Retour à Roissy (1969) et dans ses entretiens avec Régine Desforges, O m'a dit (Pauvert, 1975), Pauline Réage explique l'essentiel de ses motivations en la matière. On pourrait dire qu'Histoire d'O est aux antipodes de l'œuvre de Sade. Celle-ci, radicalement et sans appel, subversive. Celle-là, reflet d'un comportement amoureux qui, s'il peut paraître original, ne s'en situe pas moins dans les bornes de l'humanité, au contraire des écrits du divin marquis. Au moment de sa publication, seuls Georges Bataille, André Pieyre de Mandiargues et Claude Elsen surent accueillir l'ouvrage sulfureux. C'est Édouard Corniglion-Molinier, l'ami aviateur de Malraux,[...]

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