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FRÉMY DOMINIQUE (1931-2008)

Les plus grands succès, dans le domaine de l'édition de référence, sont souvent désignés du nom de leur auteur (le Bescherelle, le Mourre), plutôt que par leur titre. Dominique Frémy n'a pas connu cette consécration : s'il figure bien sur la couverture des quatorze millions de livres vendus en une quarantaine d'années, son nom reste éclipsé par le titre, admirablement trouvé, de l'ouvrage dont il fut le créateur et l'infatigable promoteur : le Quid.

Né à Paris le 5 mai 1931, Dominique Frémy suit en dilettante les cours de Sciences Po avant d'entamer une carrière de cadre chez Shell à la fin des années 1950. Mais ce non-conformiste a d'autres rêves. Curieux de tout, boulimique preneur de notes, il a l'idée d'un livre selon son goût, un répertoire bourré de faits et de dates, qui toucherait tous les domaines de connaissance et ferait la part belle à l'insolite. À ce projet, il donne le nom de Quid ? Ce titre en forme de question (le point d'interrogation sera maintenu jusqu'en 1976) convient à merveille à l'ovni éditorial que Dominique Frémy propose, au début des années 1960, aux éditeurs parisiens.

C'est finalement chez Plon que sort, au printemps de 1963, la première édition. Broché, au format de poche, il compte 632 pages et la mention « encyclopédie annuelle » figure déjà sur le premier plat. Pourtant, le succès, bien qu'honorable, est moindre que prévu. Il faudra attendre la fin de 1964 pour voir paraître le numéro deux de la série, millésimé 1965, avec une photo de Brigitte Bardot en couverture et le slogan « Tout pour tous » affiché comme un programme. Dès lors, la course au succès populaire est lancée, avec le concours promotionnel de Paris-Match. En 1969, c'est au tour de R.T.L. d'entrer dans le cercle des partenaires du Quid : une association au long cours qui ne sera interrompue, au profit d'Europe 1, qu'en 2004, 2005 et 2007.

Pour se développer, le Quid a en effet besoin de ventes massives, soutenues par les techniques commerciales de la grande distribution. Année après année, la pagination s'accroît, le champ couvert s'élargit, le tirage augmente. Dans la France du Jeu des mille francs, le « best-seller des incollables » affiche ses coquetteries : combien coûte un okapi ? Mais sur la couverture du millésime 1966, cette question voisine avec une autre, plus grave : Pourquoi sommes-nous mal logés ? Et le Quid est probablement l'un des principaux canaux de diffusion des lois, règlements et usages qui, des congés de maladie au droit locatif ou aux allocations familiales, régissent au quotidien la société française au temps des Trente Glorieuses.

Porté par le succès, Dominique Frémy va vite se retrouver à la tête d'une P.M.E. chargée de produire le contenu du Quid. Sa femme, Michèle, apparaît bientôt comme cosignataire de l'ouvrage. Une équipe de collaborateurs travaille sous leur direction à accroître et à entretenir les données. Avec son allure de notable de province, Dominique Frémy se révèle intraitable dans la défense et la valorisation de son copyright. C'est ainsi que, pour le millésime 1975, le Quid quitte Plon pour Robert Laffont. Portée par des objectifs commerciaux ambitieux, la prospérité de l'entreprise va atteindre des sommets. À leur apogée, autour de l'année 1990, les ventes atteindront régulièrement les 400 000 exemplaires par an.

Aussi peu exportable que la 2 CV Citroën ou le Minitel, le Quid triomphe dans l'Hexagone. Il concentre en deux mille pages proches du format A4 deux millions de faits petits et grands. L'index de 150 pages est le domaine réservé de Dominique Frémy qui, en bon encyclopédiste, le définit comme le « squelette » de l'ouvrage. Ses 60 000 entrées et 150 000 références lui donnent une dimension comparable à celui de l'[...]

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