STRAUSS-KAHN DOMINIQUE (1949- )
La trajectoire de Dominique Strauss-Kahn, universitaire et homme politique, est celle d'un économiste en politique qui cherche à incarner et à porter la modernisation idéologique du socialisme français. Il fait valoir son expertise au sein du Parti socialiste (PS), où le poids de l'économie a redéfini les critères de l'excellence politique mais où il n'est jamais parvenu à structurer une influence durable.
Né le 25 avril 1949 à Neuilly-sur-Seine (auj. dans les Hauts-de-Seine) dans une famille juive ashkénaze, il passe son enfance au Maroc. À la suite du tremblement de terre d'Agadir, en février 1960, sa famille est contrainte de quitter le pays et s'installe à Monaco. Diplômé de HEC, de l'Institut d'études politiques de Paris, licencié en droit public, docteur et professeur agrégé en sciences économiques, il n'est cependant pas énarque, contrairement à de nombreux dirigeants socialistes qui s'affirment dans les années 1980. Il enseigne tout d'abord l'économie à l'université de Nancy-II de 1977 à 1980 puis dans divers autres établissements (université de Nanterre, École nationale d'administration, Institut d'études politiques de Paris...).
Engagé dans la mouvance du Centre d'études, de recherche et d'éducation socialiste (CERES) de Jean-Pierre Chevènement au milieu des années 1970, il s'associe ensuite à Lionel Jospin, dont il deviendra un des plus proches lieutenants. En 1982, il entre au commissariat au Plan. Sa carrière politique débute avec les élections législatives de 1986, lorsqu'il est élu député de Haute-Savoie. En 1988, c'est dans le Val-d'Oise qu'il se présente et qu'il gagne un nouveau siège au Palais-Bourbon. Il y présidera la Commission des finances, tandis qu'au Parti socialiste il est devenu secrétaire national chargé des études et du programme (1986-1988), puis de l'économie et des finances (1988-1989). En 1991, il intègre le gouvernement d'Édith Cresson en tant que ministre délégué à l'Industrie et au Commerce extérieur. Pierre Bérégovoy le maintient dans cette fonction jusqu'aux élections législatives de 1993, où il ne résiste pas à la débâcle électorale socialiste et est battu. Mais, en juin 1995, il est élu maire de Sarcelles, ville populaire où il s'implante remarquablement. Sans grande surprise, Dominique Strauss-Kahn est nommé ministre de l'Économie et des Finances, à la suite de la dissolution inopinée de l'Assemblée nationale par Jacques Chirac et de la victoire de la gauche aux élections législatives de 1997. Il joue ainsi un rôle crucial au sein du gouvernement de Lionel Jospin dont il constitue un des soutiens indéfectibles. Dans une conjoncture internationale favorable (retour de la croissance), il lance une politique économique de soutien, modérée, à la demande qui contribue à la baisse du chômage. En 1998, ce sont ainsi près de 300 000 emplois qui seront créés dans le secteur marchand. Il incarne alors l'aile « sociale-libérale » du gouvernement. Il s'oppose à Martine Aubry sur la méthode de mise en place des 35 heures et lance des privatisations massives, notamment celle de France Télécom, que le programme de Lionel Jospin n'avait pas inscrite à l'agenda politique. Dominique Strauss-Kahn tente de structurer des réseaux au sein du PS, mais s'il réussit à fédérer jospiniens et rocardiens au sein d'un courant politique dénommé Socialisme et démocratie, il peine à convertir son autorité intellectuelle auprès des militants en un courant efficace et structuré. Jugé « velléitaire », Dominique Strauss-Kahn renâcle à faire la tournée des fédérations et des sections et à se plier aux mœurs partisanes. Mis en cause dans les médias pour des affaires judiciaires liées à ses activités d'avocat (en particulier le scandale de la MNEF et l'affaire Elf), il décide de démissionner[...]
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Écrit par
- Rémi LEFEBVRE : professeur de science politique à l'université de Lille
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