PERKINS DONALD H. (1925-2022)
Le physicien britannique Donald Hill Perkins a joué un rôle de pionnier dans le domaine de la physique des particules élémentaires, depuis ses premières observations des rayons cosmiques jusqu’aux expériences avec les faisceaux de neutrinos au Cern de Genève.
Né le 15 octobre 1925 à Kingston upon Hull, dans le Yorkshire (Royaume-Uni), de parents enseignants, en anglais et en mathématiques, il suit les cours du lycée de Hull, puis effectue ses études supérieures à l’Imperial College de Londres où il soutient sa thèse de doctorat en 1948. Son directeur de thèse est George Paget Thomson (1892-1975), prix Nobel de physique en 1937 pour la découverte de la diffraction des électrons par les cristaux, qui s’intéresse à l’époque à la physique nucléaire et à ses applications militaires. Perkins enseigne ensuite à l’université de Bristol de 1951 à 1965, puis est nommé professeur à l’université d’Oxford, poste qu’il occupera jusqu’à sa retraite en 1993.
Perkins est encore doctorant lorsqu’il accomplit un coup de maître. Depuis 1935, les physiciens sont à la recherche d’une particule nouvelle – un méson – dont l’existence a été prédite par le théoricien japonais Hideki Yukawa (1907-1981) pour expliquer les forces de cohésion des noyaux atomiques. Grâce à l’appui de son directeur de thèse auquel les autorités militaires ne peuvent rien refuser – Thomson était le responsable anglais du programme Manhattan de construction de la bombe atomique –, Perkins peut faire embarquer des plaques photographiques dans un avion de transport de la Royal Air Force effectuant un vol à haute altitude (vers 10 000 m) de plusieurs heures. Cette technique d’utilisation d’émulsions photographiques comme détecteurs de rayons cosmiques avait été récemment mise au point par l’équipe de Cecil Powell (1903-1969), professeur à l’université de Bristol. Une analyse précise de ces clichés permet à Perkins de publier en janvier 1947, dans la revue Nature,un bref article intitulé « Désintégration nucléaire par capture d’un méson », relatant la découverte d’une particule de masse intermédiaire entre celle de l’électron et celle du proton, capable de causer la désintégration d’un noyau, compatible avec la prédiction de Yukawa. En février 1947, Powell et son collaborateur italo-brésilien Giuseppe Occhialini (1907-1993) décrivent dans cette même revue scientifique l’observation de six événements semblables dans des émulsions installées à l’observatoire du pic du Midi de Bigorre dans les Pyrénées. L’existence des mésons, appelés dès lors « pions » (ou π), ne fait plus de doute. Yukawa et Powell seront récompensés par deux prix Nobel, respectivement en 1949 et 1950, auxquels aurait pu être légitimement associé le jeune Perkins.
Perkins rejoint ensuite l’équipe de Powell à Bristol et contribue, avec Peter Fowler (1923-1996), à de nombreuses études expérimentales des rayons cosmiques et des propriétés des mésons π. En 1959, ils publient une encyclopédie de clichés de rayons cosmiques – L’Étude des particules élémentaires par la méthode photographique – qui rassemble les connaissances obtenues par ce moyen. En 1961, Perkins et Fowler proposent d’utiliser des faisceaux de mésons π– – produits par exemple par la collision sur une cible de béryllium de protons accélérés jusqu’à une énergie de 400 mégaélectronvolts (MeV) dans le cyclotron de l’université de Liverpool – pour le traitement de tumeurs cancéreuses. Cette méthode sera testée à la fin des années 1970 au laboratoire de Los Alamos (Nouveau-Mexique, États-Unis) sur quelque 200 patients, mais l’usage de faisceaux de protons (la protonthérapie) se révélera beaucoup plus avantageux, et l’usage thérapeutique de faisceaux de mésons π ne se développera pas.
L’activité de Perkins se déploie dans[...]
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Écrit par
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
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