DONATELLO (1383 ou 1386-1466)
« Sculpteur florentin du xve siècle », ainsi présente-t-on généralement Donatello, mais la formule se révèle par trop étroite et contraignante tant le génie propre de l'artiste la dépasse : associé à l'épanouissement de Florence, présent dans les grandes réalisations de sa cité natale, en relation avec ceux qui en font le renom, tels Ghiberti et Brunelleschi, animateur huit années durant d'un atelier en compagnie de Michelozzo, Donatello échappe cependant au style, à l'esprit de Florence ; le rayonnement de son œuvre en fait d'abord un artiste italien, et la voie qu'il suit en fait plus qu'un sculpteur, et autre chose qu'un artiste « de la Renaissance ». Aussi ne peut-il être comparé ou assimilé à aucun des créateurs – sculpteurs ou non – de son époque : l'étendue, la diversité de son activité créatrice à l'intérieur d'un domaine très restreint de la sculpture constituent sa première originalité.
Un artiste italien
Donato di Niccola di Betto Bardi naît et meurt à Florence ; sa vie est mal connue – pour sa naissance, deux dates sont avancées, 1383 ou 1386 – ce qui importe peu tant sa carrière créatrice se suffit à elle-même. Sa biographie, pas plus que son origine florentine ne sauraient expliquer la profonde originalité de l'artiste, qui le conduira vite à une solitude où il demeurera jusqu'à la fin de son œuvre. Ses premières statues, d'inspiration religieuse, toutes de marbre, sont destinées soit à la cathédrale Santa Maria del Fiore – ainsi les quatre Prophètesdu campanile, entre 1415 et 1436 –, soit à l'église Or' San Michele, tel le célèbre Saint Georges, vers 1415. Ce sont là deux chantiers auxquels continuent de travailler tous les artistes florentins, mais rapidement Donatello se distinguera de ses contemporains. Élève de Ghiberti, il s'affirme dès ses premières œuvres, en partie grâce aux leçons qu'il tire de l'art antique. Âgé d'une vingtaine d'années, il se rend à Rome, comme tous les jeunes artistes de son temps – en compagnie de Brunelleschi. De ses observations, des mesures qu'il prend, il tire vite plusieurs conséquences, techniques certes, pour le poli du marbre, le fini du bronze, l'aisance des mouvements et le traitement du nu, mais, surtout, spirituelles : il repense l'art de la statue en fonction du cadre qui lui est imposé pour le mieux abolir, et abandonne les représentations traditionnelles ou stéréotypées pour une approche personnelle du sujet traité, une plus grande pénétration psychologique ; individu, il crée des individus qui, saints ou héros, fixeront sur le monde le regard d'une conscience nouvelle, née de l'impérieuse exigence de l'artiste pour lui-même et ses créations.
Dans cette perspective d'une utilisation foncièrement personnelle de l'héritage antique, qui l'amène à transcender l'art florentin, son deuxième voyage romain, entrepris à l'âge mûr, est significatif. Il prélude aux grands itinéraires dans toute la péninsule, voyage d'études, et aussi de créations puisque Donatello sculpte un grand Tabernacle vers 1430 pour la basilique Saint-Pierre de Rome, et sans doute deux tombeaux.
Nombre de cités l'appellent où il poursuit une œuvre que le courant « classique » qui se développe à Florence ne comprend plus. Après Naples, Sienne lui commande des fonts baptismaux (entre 1423 et 1434) ; puis à Padoue, Donatello ouvre un atelier et entreprend deux œuvres monumentales : le maître-autel de l'église Saint-Antoine (1446 à 1449), orné de reliefs et de sept grandes statues de bronze, et la statue équestre du Gattamelata, coulée entièrement en bronze et finie en 1453, commandée par Venise où il se rend ensuite. De là, il ira à Ferrare, à Prato, à Sienne, pour un deuxième séjour au cours[...]
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Écrit par
- Patrick OLSSON : diplômé d'histoire
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Médias
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