DOT
La vulgarisation du vocabulaire juridique conduit parfois à grouper sous le même terme des institutions d'une similitude très approximative et à créer ainsi un rapport artificiel difficile à maintenir. La précision des termes du droit s'accommode difficilement d'une confusion et d'une incohérence qu'explique, sans doute, l'emploi quasi général d'une terminologie occidentale inapte, dans bien des cas, à exprimer la signification profonde d'institutions particulières dont on ne trouve pas l'équivalent exact : l'abus naît de la volonté de rapprochement ou de l'impuissance à forger des expressions plus adéquates. Ainsi, sous le vocable « dot », place-t-on un ensemble d'institutions dont ni la nature ni les buts ne sont identiques, et qui n'ont pour point commun que de naître à l'occasion d'un mariage. L' institution du mariage est le seul trait d'union que l'on observe entre ces « dots » dont la spécificité doit être signalée par des formules plus complexes : dos ex marito, contre-dot, prix de la fiancée, etc.
Au sens juridique et restreint du terme, la dot doit être entendue comme un ensemble de biens apportés généralement par l'épouse pour contribuer aux charges du ménage (telle était la conception du droit occidental moderne, héritée du droit romain). Mais, au sens large de l'expression, elle se rapproche du douaire ou gain de survie de l'épouse (mahr des musulmans, dos propter nuptias des Romains), ou s'identifie au « prix de la fiancée » (pratique babylonienne, hébraïque, africaine, etc.), terme dont tous les ethnologues déplorent l'emploi malheureux, encore qu'ils le maintiennent par habitude.
Quoi qu'il en soit, le terme paraît impliquer constamment la fourniture de prestations faites en vue d'un mariage, ce qui permet d'établir une théorie générale de l'institution.
Notion
La notion de dot est liée à celle de mariage ; elle intéresse soit les rapports pécuniaires, soit les rapports personnels qui s'établissent entre les époux.
La dot et les rapports pécuniaires entre époux
La dot est généralement constituée dans l'intention de permettre à la femme de contribuer aux charges du ménage – « dos sustineat onera matrimonii », diront les glossateurs –, mais aussi dans celle de garantir la restitution des biens dotaux à la dissolution de l'union conjugale. Il semble pourtant que la volonté de conserver la dot et d'assurer son retour ait été le principal objectif du régime dotal dès les temps les plus anciens ; même lorsque l'on considère le mari comme son propriétaire, comme en droit romain, on ne manque pas de stipuler très tôt une clause de restitution et de donner une action pour garantir le retour de la dot à la dissolution de l'union conjugale. La liberté de disposition reconnue à l'époux est limitée par l' inaliénabilité des biens les plus importants, en principe les immeubles. Toutes les précautions sont prises soit pour protéger l'épouse contre l'affection qui l'entraînerait à autoriser l'aliénation de sa dot au profit de son mari, soit contre les créanciers du mari. Cet excès de précautions fige une masse de biens inaliénables, imprescriptibles et insaisissables, qui ne profitent que faiblement au ménage mais dont la restitution est certaine à la dissolution de l'union matrimoniale.
Assurer au moyen de la dot la sécurité matérielle de l'épouse à la rupture du mariage suppose que l'épouse ne retire rien de la vie commune sur le plan pécuniaire et le régime dotal implique, dit-on, un régime de séparation de biens entre époux. Or la dot apportée par l'épouse dans son ménage n'exclut pas toujours l'application d'un régime matrimonial différent de celui de la séparation de biens. Il peut arriver que l'apport d'une[...]
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Écrit par
- Annie ROUHETTE : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de l'université de Madagascar
Classification
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