CANONIQUE DROIT
Article modifié le
Le droit des Églises orientales catholiques
L'activité et la vie interne des vingt et une Églises orientales catholiques, dont six sont dites Églises patriarcales, relèvent du nouveau Code promulgué le 18 octobre 1990. Le concile Vatican II a reconnu la spécificité d'organisation de ces Églises. Elles « possèdent depuis leur origine, dit-il, un trésor auquel l'Église d'Occident a puisé beaucoup d'éléments de la liturgie, de la tradition spirituelle et du droit » (décret sur l'œcuménisme, UnitatisRedintegratio, no 14). C'est pourquoi « les Églises d'Orient, conscientes de la nécessaire unité de toute l'Église, ont la faculté de se régir selon leurs propres disciplines » (ibid., no 16). Le Code désigne ces Églises Ecclesiae sui iuris, affirmant ainsi leur autonomie disciplinaire fondée sur l'existence, reconnue expressément ou tacitement par l'autorité suprême (le pape), d'une communauté de personnes de tous les états canoniques (clercs, laïcs, consacrés dans la vie religieuse) réunies par une hiérarchie propre et par le lien du rite. Le terme rite possède en droit oriental un sens riche qui dépasse les seuls aspects liturgiques. Le canon 28, paragraphe 1, le décrit comme un patrimoine liturgique, théologique et disciplinaire qui se distingue par la culture et l'histoire des peuples et s'exprime selon le mode où est vécue la foi de chacune des Églises.
En dehors de groupes de fidèles reliés à une hiérarchie auxquels le droit pourrait donner une autonomie propre mais qui actuellement dépendent directement du siège apostolique de Rome (ainsi les Églises orientales biélorusse, hongroise, ruthène, etc.), les Églises sui iuris sont d'abord les antiques Églises patriarcales, les Églises archiépiscopales majeures et les Églises métropolitaines. À leur tête, selon les cas, se trouvent un patriarche, un archevêque majeur ou un évêque métropolitain à qui sont attribués des devoirs et des droits semblables, sauf disposition du droit. En fait, l'institution patriarcale, déjà reconnue par les premiers conciles œcuméniques, se différencie des deux autres, selon la tradition orientale, surtout par l'honneur qu'elle reçoit. Le concile fondait cet honneur sur la tradition ancienne de l'Église et sur le fait que les patriarches « président à leurs patriarcats respectifs comme pères et chefs » (décret sur les Églises orientales catholiques, OrientaliumEcclesiarum, nos 8 et 9). Le patriarche est élu dans le synode des évêques de l'Église patriarcale. Aussitôt élu et ayant manifesté son acceptation, le nouveau patriarche, à condition qu'il soit déjà ordonné évêque, est proclamé et intronisé par le synode selon le rite prévu dans les livres liturgiques. Ensuite, le synode, par lettre synodale, informe le pontife romain de l'élection, de l'intronisation et du fait que la profession de foi a été émise devant le synode. De son côté, le nouveau patriarche demande la « communion ecclésiastique » au pape pour signifier le lien qui unit le patriarche et son Église au siège apostolique de Rome. Dès son intronisation, le patriarche gouverne, mais il ne peut convoquer le synode ni ordonner des évêques avant d'avoir reçu la communion ecclésiastique du Pontife romain. La procédure d'élection des archevêques majeurs d'Églises sui iuris est différente : élu par le synode des évêques de son Église, son élection doit être confirmée par le pape.
Le patriarche est évêque d'une éparchie (diocèse) où il possède les droits et devoirs de tout évêque, mais, sur le patriarcat formé de plusieurs éparchies, il a un pouvoir étendu qu'il exerce personnellement ou au sein du synode, composé des évêques et des métropolitains du patriarcat. Patriarche et synode sont les deux instances suprêmes de gouvernement du patriarcat, le synode ayant surtout à exercer un pouvoir législatif. Avec son synode, le patriarche peut, en particulier, ériger de nouveaux éparchats, constituer des provinces et nommer les évêques sur le territoire patriarcal. La place faite au territoire explique que l'étendue des pouvoirs du patriarche est limitée dans l'espace car les fidèles d'une Église patriarcale installés en Occident ne relèvent pas directement de la juridiction du patriarche. Ainsi, en France, les fidèles de rites orientaux sont placés sous la juridiction de l'archevêque de Paris, désignés à cet effet « ordinaire des Orientaux en France », de sorte que, pour les aspects juridiques comme la nomination de titulaires de charges pastorales sur le territoire de la Conférence des évêques français, le patriarche ne jouit d'aucun pouvoir propre et autonome. Ce point juridique est source de difficulté dans les relations entre Occidentaux et Orientaux, et comporte des aspects œcuméniques dans la mesure où la discipline des Églises orthodoxes est différente. Ces difficultés pourraient être résolues avec la promulgation d'un droit spécial ou d'un droit particulier. Il faut rappeler, en effet, que les canons du Code promulgué forment un droit commun à toutes les Églises, qui devra être considérablement augmenté d'un droit particulier permettant aux diverses communautés orientales d'encadrer juridiquement leur propre spécificité. Ainsi, des parties du Code comme les canons concernant les sacrements, le magistère ecclésiastique, la gestion des biens, les jugements, etc., qui pour certaines sont proches de celles du Code latin, seront adaptées aux diverses situations.
Accédez à l'intégralité de nos articles
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Patrick VALDRINI : doyen de la faculté de droit canonique de Paris (Institut catholique)
Classification
Autres références
-
CODE DE DROIT CANONIQUE
- Écrit par Jean-Urbain COMBY
- 223 mots
Réalisation d'un projet annoncé par Pie X en 1904, le Codex juris canonici est promulgué le 27 mai 1917 par Benoît XV. Renonçant à une longue tradition, l'entreprise menée par Mgr Gasparri veut remplacer par une codification claire, à l'image des Codes civils français et allemands,...
-
ANIMALIER DROIT
- Écrit par Olivier LE BOT
- 4 687 mots
...viie siècle. En Occident, où la considération portée à l'animal est plus récente, le premier texte prescriptif apparaît au xvie siècle. En 1567, le pape Pie V édicte une bulle intitulée De Salute Gregis (« Sur le salut du troupeau »), qui déclare l'interdiction totale des jeux taurins.... -
APPEL COMME D'ABUS
- Écrit par Joël GREGOGNA
- 693 mots
Voie tendant à la cassation ou à l'annulation d'une décision abusive d'une juridiction sortant du domaine de sa compétence, l'appel comme d'abus est un procédé de droit employé par la royauté dans sa lutte pour assurer la suprématie du pouvoir juridictionnel, à l'encontre des juridictions ecclésiastiques,...
-
BOLOGNE ÉCOLE JURIDIQUE DE
- Écrit par Jean GAUDEMET
- 805 mots
Le centre d'enseignement juridique le plus illustre du Moyen Âge. Les débuts de l'université de Bologne restent mal connus : Ravenne et Pavie avaient sans doute pendant le haut Moyen Âge tenu la première place en Italie pour un enseignement du droit, d'ailleurs assez modeste ;...
-
BOLOGNE UNIVERSITÉ DE
- Écrit par Jacques VERGER
- 813 mots
Au début du xiie siècle se produisit en Italie une renaissance des études juridiques dont Bologne fut le foyer principal. Les luttes politiques (papes contre empereurs, communes contre empereurs) poussaient les partis en présence à appuyer leur propagande sur des arguments de droit ; on...
- Afficher les 25 références
Voir aussi
- VŒU, religion
- SUSPENSE, droit canonique
- ÉGLISE & ÉTAT
- ECCLÉSIALES INSTITUTIONS
- MARIAGE, droit canon
- LITURGIE ROMAINE
- FOR ECCLÉSIASTIQUE
- ÉGLISE HISTOIRE DE L', des origines au concile de Trente (1545)
- ÉGLISE HISTOIRE DE L', du concile de Trente à nos jours
- ORIENT ÉGLISES CATHOLIQUES D' ou UNIATES
- EXCOMMUNICATION
- PASTORAL MINISTÈRE
- INSTITUTS SÉCULIERS
- ÉGLISE CATHOLIQUE ORGANISATION DE L'
- SANCTIFICATION