CONSTITUTIONNEL DROIT
Le droit constitutionnel s'est édifié en discipline juridique autonome au xixe siècle lorsqu'à la suite de la Révolution française apparurent un peu partout en Europe, sous le nom de constitution, de charte ou de statut, des constitutions écrites. Aussi est-il patent que, dès l'origine, le droit constitutionnel a été lié à des événements politiques, voire à une certaine conception des rapports politiques. Cette liaison, qui ne s'est jamais démentie, a simultanément marqué les limites et précisé la chance de cette branche du droit.
D'une part, en effet, le droit constitutionnel est une discipline aléatoire pour la simple raison que les phénomènes du pouvoir se laissent difficilement enfermer dans des cadres juridiques. Les rapports de force ont une influence prépondérante sur l'élaboration des règles juridiques, et surtout sur leur sanction : c'est en droit constitutionnel que ce dernier élément, qui est de l'essence même de la notion de règle de droit, fait le plus cruellement défaut. Mais ce caractère aléatoire de la règle de droit constitutionnel a été, d'autre part, un stimulant particulièrement bénéfique. Cette discipline n'a jamais été suffisamment sûre d'elle-même pour s'endormir dans l'exégèse des textes.
En somme, le droit constitutionnel a été, du fait même de l'incertitude de ses fondements, la branche du droit qui a connu les progrès intellectuels les plus sûrs. Ainsi peut-on expliquer que l'objet de cette discipline soit encore largement indéterminé, alors que ses méthodes sont déjà très fécondes.
L'objet
L'objet du droit constitutionnel ne peut être saisi que par approches successives. Il faut d'abord exposer les éléments classiques de la définition de ce droit avant de tenter de donner un contenu précis à cette définition.
Éléments de définition
Selon la conception « formelle », le droit constitutionnel est tout simplement le droit des constitutions, c'est-à-dire la discipline qui étudie les dispositions contenues dans les textes constitutionnels. Ces textes sont aisément identifiables par le caractère solennel de leur élaboration et de leur éventuelle modification. Définir par rapport à eux le droit constitutionnel est dès lors la façon la plus élégante et apparemment la plus rigoureuse d'éliminer toute difficulté concernant le champ d'application de cette discipline. Mais il va presque sans dire qu'il s'agit là d'une équation beaucoup trop simple. D'une part, en effet, la notion de droit constitutionnel déborde largement la notion de constitution, dans la mesure où un certain nombre de dispositions juridiques, essentielles pour le fonctionnement de l' État, ne se trouvent pas dans un texte constitutionnel écrit. À la limite, il existe des pays, d'ailleurs parfaitement modernes et démocratiques – la Grande-Bretagne est le plus souvent citée à cet égard – qui n'ont pas de « constitution » au sens juridique précis du terme : cela n'implique évidemment pas qu'ils n'aient pas de droit constitutionnel. À l'inverse, la notion de droit constitutionnel est parfois plus restreinte que celle de constitution. Car il est des hypothèses où, pour des raisons politiques, les auteurs des constitutions y incluent des règles auxquelles ils veulent donner une valeur juridique particulièrement élevée sans que pour autant ces règles concernent le fonctionnement de l'État et des pouvoirs publics : le droit constitutionnel perdrait toute unité intellectuelle si de telles règles en faisaient partie.
Selon la conception « matérielle », le droit constitutionnel se définit par référence non à une catégorie de textes mais à un groupe de matières. Il comprend l'ensemble des règles qui « constituent » la société politique, et son expression[...]
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Écrit par
- André DEMICHEL : agrégé des facultés de droit, professeur à l'université de Paris-VIII
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