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CONSTITUTIONNEL DROIT

Les méthodes du droit constitutionnel

Le droit constitutionnel est sans doute la première des disciplines juridiques à être passée de la méthode exégétique à la méthode dialectique. Mais il est toujours le terrain du vieux conflit entre la méthode positive et la méthode normative. Il devra choisir entre la méthode des modèles et la méthode des cas.

De la méthode exégétique à la méthode dialectique

Il y a deux façons d'enseigner et d'étudier le droit. La première consiste à appréhender les textes et les règles comme des valeurs en soi, à les disséquer, à en faire l'exégèse. La seconde, à envisager la règle juridique comme un élément du contexte social où elle est insérée, dont elle est le produit, voire le moteur, mais dont il est vain de l'isoler.

L'action conjuguée de l'idéalisme juridique hérité des jacobins et du conformisme légaliste de la société bourgeoise a longtemps imposé, en France par exemple, la méthode exégétique comme la seule convenable aux études de droit. Les premiers privatistes faisaient des « cours de code civil » et leurs héritiers ont encore bien du mal à se défaire de cette forme de raisonnement. Mais le droit constitutionnel s'est dégagé très tôt de cette contrainte. Duguit, pour des raisons doctrinales, a imposé le premier une approche sociologique des phénomènes juridiques. Cette tentative ne devait pas rester isolée, car le terrain était favorable du fait des habitudes de pensée héritées du marxisme. Et le développement de la science politique prenant le relais de ces options doctrinales a rendu désormais impossible le pur juridisme dans les études de droit constitutionnel.

Méthode positive et méthode normative

La méthode positive consiste à étudier les règles de droit telles qu'elles sont, sans les juger. La méthode normative consiste à aborder cette étude par rapport à un certain nombre de principes posés comme un impératif, et à valoriser ou à critiquer les règles de droit positif selon qu'elles sont ou non conformes à ces principes.

Le conflit de méthodes est permanent. Dans l'Antiquité, Platon, théoricien, s'opposait déjà à Aristote, pur politologue. Puis, la classique distinction du droit naturel et du droit positif a bien mis en lumière les éléments du problème, qui est de savoir si le droit positif doit être jugé par référence à un droit naturel qu'il n'appartiendrait pas à la volonté humaine de transgresser, et qui primerait tous les impératifs socio-économiques. On sait que Montesquieu lui-même, qui se voulait observateur objectif des phénomènes politiques, posait comme impératif catégorique la conformité des constitutions à certains principes de droit naturel.

Cette distinction est actuellement relayée par celle de la légalité et de la légitimité. Aux constructions purement légalistes, comme celles de Kelsen et de Carré de Malberg, pour lesquelles le seul critère de la « bonne règle » est sa conformité à la règle hiérarchiquement supérieure, sont opposées de plus en plus fréquemment des considérations tirées de la légitimité ou de l'absence de légitimité du pouvoir qui a édicté cette règle – le gouvernement légitime étant celui qui correspond à la conception du pouvoir juste qui est celle d'un individu ou d'une société. On voit que cette notion est valorisante, même si elle est maintes fois utilisée à des fins de prestige politique.

Le droit constitutionnel contemporain évolue plutôt dans un sens positiviste. Ainsi, dans ses Institutions politiques de l'Allemagne contemporaine, écrites en 1915, Joseph Barthélemy n'étudiait le droit constitutionnel du IIe Reich qu'avec un visible mépris. Cinquante ans plus tard, les démocrates traitaient de l'Amérique latine avec sérénité.

Mais le positivisme a ses limites. Il n'est ni possible ni d'ailleurs[...]

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  • : agrégé des facultés de droit, professeur à l'université de Paris-VIII

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