INGÉRENCE DROIT D'
Ingérence humanitaire et usage de la force
Un obstacle majeur surgit lorsque le territoire de l'État demeure inaccessible à l'assistance humanitaire parce que des forces régulières ou irrégulières s'opposent au transit des secours. Peut-on alors faire usage de la force ? À partir de 1991, le Conseil de sécurité consacre une nouvelle lecture du chapitre VI puis du chapitre VII de la Charte. Ainsi, en 1992, une opération de maintien de la paix classique, sous casque bleu, l'Onusom I (Opération des Nations unies en Somalie) a été mise en place par le Conseil de sécurité avec pour tâche « d'assurer aux convois de secours des Nations unies une escorte militaire suffisamment forte pour décourager les attaques » (résolution 751 du 24 avril). Mais cette opération demeure insuffisante et le Conseil de sécurité décide, en 1993, dans sa résolution 794, d'autoriser l'action de forces nationales. Sous le nom de Restore hope, la nouvelle opération se déploie parallèlement à l'élargissement du mandat de la force des Nations unies, décidé par la résolution 814 le 26 mars 1993. Onusom II est la première opération autorisée à recourir à la force en vertu du chapitre VII de la Charte. Elle mobilise des forces nationales de plusieurs pays intervenants, sous commandement unifié. Il s'agit donc, selon l'expression du secrétaire général, de la première opération d'« imposition » de la paix. Depuis lors, d'autres interventions ont été décidées ou habilitées par le Conseil de sécurité, en faveur de la libre distribution de l'aide humanitaire ou pour soustraire à leur agresseur les victimes de conflits internes (Bosnie, Haïti, Albanie, Timor, Kosovo, Darfour, etc.)
Le développement de la justice pénale internationale par les deux tribunaux pénaux internationaux (T.P.I.), institués par le Conseil de sécurité pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, est également une relative nouveauté consécutive à l'affirmation du « droit d'ingérence ». Ces deux juridictions ont pour but de lutter contre l'impunité et de poursuivre les auteurs de génocides, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité perpétrés à l'intérieur de ces deux États. Ni le Rwanda (qui siégeait au Conseil de sécurité lors de l'adoption du statut du T.P.I.R.) ni l'ex-Yougoslavie n'ont accepté la création de ces juridictions qui leur ont été imposées comme décision intrusive du Conseil. Les poursuites engagées et les peines prononcées n'ont épargné ni les auteurs subalternes d'actes particulièrement cruels, ni les responsables gouvernementaux qui les ont suscités. La Cour pénale internationale (C.P.I.) agira peut-être dans le même sens, en dépit des multiples précautions qu'ont prises les rédacteurs de son statut pour éviter qu'elle ne s'immisce trop profondément dans les affaires intérieures des États, et malgré le refus de nombreux grands États d'adhérer à son statut.
La souveraineté n'est donc pas remise en cause par le « droit d'ingérence humanitaire ». Ce dernier exige seulement qu'elle s'exerce de façon humaine et fonde l'O.N.U. à employer ou à autoriser la contrainte pour y parvenir.
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Écrit par
- Mario BETTATI : professeur de droit international à l'université de Paris-II-Panthéon-Assas
Classification
Médias
Autres références
-
KOUCHNER BERNARD (1939- )
- Écrit par Antoine SCHWARTZ
- 1 119 mots
Médecin et homme politique français.
En mai 2007, le choix du président Nicolas Sarkozy de nommer Bernard Kouchner, cofondateur de Médecins sans frontières et de Médecins du monde, au ministère des Affaires étrangères et européennes pouvait surprendre. Rien de moins évident, en effet, que d'imaginer...