DROIT Droit comparé
Éléments d'une méthode
Une réflexion autocritique s'est engagée dans les années 1990 au sein de la communauté des juristes comparatistes, qui devrait conduire, à terme, au renouvellement méthodologique du droit comparé. D'une part, la perspective de l'intégration européenne a été l'occasion d'ouvrir le débat sur la faisabilité et l'opportunité d'un Code civil européen, plaçant le rôle du droit comparé au cœur de la discussion : pour les partisans de la codification, il s'agissait de démontrer qu'une recherche comparative approfondie conduirait à redécouvrir les bases communes d'un droit savant d'origine romaine ; pour ses adversaires, c'était l'occasion de rappeler les oppositions irréductibles entre les ordres juridiques concernés, notamment entre ceux de common law et ceux du droit civil ; enfin les tenants d'une voie moyenne pouvaient mettre en relief aussi bien les convergences que les différences entre les droits concernés en vue de mieux mesurer les chances de succès de toute initiative unificatrice. D'autre part, aux États-Unis, un mouvement a vu le jour qui vise à restituer les disciplines juridiques sur la carte des sciences sociales ; il s'agit de montrer que le droit comparé peut offrir du phénomène juridique une perspective suffisamment sophistiquée pour pouvoir constituer le lien avec ces dernières. En 1998, l'American Journal of Comparative Law a publié les rapports d'un important colloque tenu à Ann Arbor à l'initiative d'Ugo Mattéi et Mathias Reimann, réunissant comparatistes américains et européens afin d'établir un nouveau programme pour cette discipline. À cette occasion, les partisans d'une amélioration du capital académique européen s'opposèrent aux partisans d'une remise en cause plus profonde de l'édifice traditionnel, qui tendrait à abandonner l'héritage des années 1950 au profit de nouvelles perspectives « postmodernes ». Quoi qu'il en soit de la voie à suivre, le renouvellement méthodologique de la science comparative est ainsi clairement à l'ordre du jour des deux côtés de l'Atlantique.
Les outils préalables
Le succès de la démarche comparative est tributaire, d'une part, de la qualité de l'information sur l'ordre juridique objet de la comparaison et, d'autre part, d'une perception éclairée de la spécificité de la traduction juridique.
L'information requise
Cette information concerne tout d'abord les données positives relatives au système étudié. S'il est évidemment préférable de consulter directement les sources étrangères, force est de reconnaître que l'accès à ces dernières n'est pas toujours aisé. Divers outils ont été développés afin d'améliorer la diffusion d'écrits sur les divers systèmes, telle la monumentale International Encyclopedia of Comparative Law. Par ailleurs, l'accessibilité des sources de droit positif des systèmes étrangers s'est sensiblement améliorée, grâce au développement de l'informatique. En France, les efforts déployés en ce sens, notamment par la création en 1992 du groupement Droit et médias, ne suffisent pas, cependant, à constituer un centre de documentation et de recherche de l'envergure de l'institut Max-Planck en Allemagne, de l'Institut suisse de droit comparé, ou de l'institut Asser en Hollande. Il importe évidemment de souligner que l'information brute est inutile sans la formation nécessaire à son exploitation éclairée. L'essor des échanges universitaires d'étudiants, notamment dans le cadre des échanges universitaires du programme européen Erasmus, est également de nature à améliorer la qualité de l'exploitation de l'information par les générations futures de juristes en développant chez ces dernières le réflexe comparatiste. C'est précisément parce que le juriste[...]
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Écrit par
- Horatia MUIR WATT : professeur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, directeur adjoint, Unité mixte de recherche de droit comparé de Paris (Paris-I-C.N.R.S.)
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Média
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