DROIT ET CITOYENNETÉ AU DÉBUT DU XXIe SIÈCLE
La relation de l'individu au droit est traditionnellement appréhendée par le biais de la distinction entre droit objectif (la règle qui s'impose à tous les individus, objets de droit) et droit subjectif (l'individu en tant que titulaire de droits, qu'il peut exercer). Mais la façon dont l'individu lui-même perçoit cette relation peut prendre des formes très différentes. Tantôt, endossant l'habit du citoyen, l'individu participe en effet à la vie de la cité et, indirectement, à l'édiction de normes ; tantôt, endossant celui du justiciable, il se montre déterminé à faire valoir ses droits individuels ou à les défendre. Or cette perception correspond à une véritable évolution des choses : le citoyen est aujourd'hui plus directement impliqué dans la construction normative ; le justiciable voit s'estomper l'application de la norme par le juge, au profit d'une recherche de solution négociée ; enfin, grâce à la « question prioritaire de constitutionnalité », instituée par la réforme de la Constitution de 2008, le justiciable devient lui-même l'un des gardiens de la conformité de la norme.
Contrairement aux idées reçues, le droit est en mouvement constant et les normes juridiques sont provisoires, voire précaires. Le sociologue du droit y verra une conséquence du fait que le droit « émane du groupe social et qu'il ne saurait avoir plus de stabilité que ce groupe lui-même » (Henri Lévy-Bruhl, 1961). Ainsi, des modifications aussi importantes et rapides que celles survenues dans la structure familiale ou dans les technologies de l'information ont engendré un besoin d'édicter de nouvelles règles. Le souci d'une réponse normative quasi instantanée a trop fréquemment abouti à une inflation de textes particulièrement difficile à suivre, y compris par les professionnels du droit. Dans ce cadre, les évolutions récentes de la relation des individus au droit, en favorisant leur participation au processus de création normative et à la résolution des différends, pallient sans doute en partie le sentiment d'étrangeté ressenti fréquemment par les citoyens-justiciables, quand ils ont affaire au droit ou à la justice.
Une nouvelle relation au droit pour le citoyen
L 'inflation normative est un fait. L'évolution des codes de droit nous en donne la mesure : la Commission supérieure de codification fait état, pour les seules matières juridiques codifiées, d'une augmentation de 17 p. 100 du nombre d'articles et de 40 p. 100 du nombre de mots dans les codes, entre 2000 et 2010. En découle une nette accentuation de l'instabilité normative. Le risque est bien évidemment l'incompréhension de la règle, sa méconnaissance ou, pire, « le mépris croissant des Français envers la loi réduite à l'état d'affichage permanent » (Jean Hauser, 2012). À tel point que le Conseil constitutionnel n'a pas manqué de reconnaître que l'accessibilité et l'intelligibilité du droit sont deux objectifs constitutionnels qui participent à la sécurité juridique.
Rendre le droit accessible
Rendre le droit accessible, c'est permettre au citoyen d'avoir accès aux textes légaux. C'est la mission dévolue à Legifrance, service public de la diffusion du droit par Internet créé par le décret 2002-1064 du 7 août 2002. L'objet de ce service est de permettre l'accès du public aux normes en vigueur, ainsi qu'à la jurisprudence. Il regroupe notamment l'ensemble des normes françaises (Constitution, lois, règlements, droit codifié ou non, conventions collectives et même, depuis 2012, les circulaires et avis), ainsi que les textes européens et internationaux. C'est donc l'ensemble du droit applicable qui se trouve accessible gratuitement et en tous lieux.
Rendre le droit intelligible
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Écrit par
- Renaud DEMOYEN : avocat à la Cour
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Média