EUROPÉEN DROIT
Les tentatives d'unification du droit d'inspiration européenne
Cette coordination régionale des droits des États formant la Communauté européenne, de même que l'élaboration plus souple, mais ayant vocation territoriale plus étendue, d'un droit européen uniforme ou harmonisé sous l'impulsion du Conseil de l'Europe peuvent aussi trouver un modèle et un précédent dans les travaux d'unification du droit positif qui se sont poursuivis depuis la fin du xixe siècle. Par les États ou les organismes internationaux qui les entreprennent et par le domaine territorial qu'ils aspirent à couvrir, ces travaux d'unification sont en effet, et surtout étaient à l'origine, sinon exclusivement, du moins principalement européens (pourvu que l'on accepte de ne pas réserver ce qualificatif à une action qui couvrirait la totalité de l'Europe géographique).
On citera d'abord, à cet égard, l'effort systématique d'unification des règles de conflits de lois (qui déterminent la loi applicable aux situations juridiques de caractère international) et de reconnaissance des jugements étrangers entrepris depuis la fin du xixe siècle par la Conférence de droit international privé de La Haye. À l'origine, la Conférence réunissait principalement des États d'Europe continentale ; elle s'est considérablement élargie par la suite, incluant notamment des États du Moyen-Orient, le Japon (1957), mais aussi le Royaume-Uni (1955) et, depuis 1964, les États-Unis et la France (au 30 octobre 2002, la Conférence de La Haye comprend 62 États membres. Certaines seulement des conventions multilatérales qu'elle a élaborées sont en vigueur, et encore ne lient-elles qu'une partie des États représentés ; celles du début du xxe siècle, dont la plupart ont du reste été dénoncées par tout ou partie des signataires, étaient essentiellement « continentales » d'inspiration. Il en a encore été ainsi de plusieurs conventions préparées après la Seconde Guerre mondiale (comme celles sur la vente internationale, la reconnaissance des sociétés, les obligations alimentaires envers les enfants, la protection des mineurs) ; les plus récentes tentent une conciliation entre le droit international privé de la common law et celui du système continental. Qu'elles forment ou non le droit positif de certains États, ces conventions constituent une sorte de codification de principes acceptables par un nombre important de systèmes nationaux, à laquelle il est déjà arrivé que les juges se réfèrent pour interpréter et appliquer la législation et la jurisprudence de leur propre pays.
D'autres tentatives ont visé à l'unification du droit matériel lui-même, c'est-à-dire des règles qui ne se bornent pas à désigner la loi étatique applicable, mais régissent directement l'institution considérée ; certaines y sont assez largement parvenues.
C'est ainsi qu'ont été adoptées à Genève, respectivement les 7 juin 1930 et 19 mars 1931, deux séries de conventions, les unes portant loi uniforme, les autres règlements de certains conflits en matière d'effets de commerce et de chèques ; elles ont été ratifiées surtout par des États européens (à l'exclusion du Royaume-Uni), qui ont introduit la loi uniforme dans leur propre législation. Plus récemment ont été adoptées à La Haye (mais non dans le cadre de la Conférence de droit international privé) les conventions du 1er juillet 1964 portant loi uniforme sur la vente internationale des objets mobiliers corporels (qui intéresse surtout, en pratique, les ventes commerciales internationales) : elles sont issues de longs travaux, dont l'initiative avait été prise, dès avant la Seconde Guerre mondiale, par l'Institut international pour l'unification du droit privé (Unidroit) de Rome. Mais il faut noter que, si[...]
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Écrit par
- Berthold GOLDMAN : professeur à l'université de Paris-II, président honoraire
- Louis VOGEL : professeur à l'université de Paris-II-Panthéon-Assas, directeur de l'Institut de droit comparé de Paris
Classification
Médias
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