DROIT INTERNATIONAL DU CLIMAT
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Au tournant des xxe et xxie siècles, en quelques décennies, le changement climatique est devenu un sujet de préoccupation majeur et largement partagé à travers le monde. Les médias se font l’écho quotidiennement de ses manifestations : réchauffement, sécheresses, tempêtes, inondations, mégafeux, fonte des glaces, élévation du niveau de la mer. Rapports et évaluations scientifiques se succèdent pour mettre en évidence une réalité de plus en plus inquiétante, qui devance de nombreuses projections. Parmi ces documents, les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) jouissent d’une médiatisation croissante. Ils mettent en évidence le consensus mondial entre les scientifiques sur la réalité du changement climatique et la responsabilité humaine dans leur apparition, à travers l’émission de gaz à effet de serre et la destruction ou la fragilisation des « puits » de ces mêmes gaz que sont les forêts et les océans. Ces rapports décrivent les conséquences du changement climatique et analysent les politiques conduites en la matière, lesquelles visent à la fois à limiter les changements et à s’y adapter (GIEC, 2023). Les scientifiques y alertent sur les dangers du réchauffement et l’urgence à agir. Ils s’interrogent sur les perspectives d’une planète devenant inhabitable, à la suite du franchissement d’un certain nombre de dangereux points de bascule (Rockstrom, 2009) rendant envisageable l’effroyable perspective d’une « terre-étuve » (Steffen et al., 2018).
S’agissant d’une menace globale – au sens de planétaire – sur notre environnement, une coopération entre les États s’avère particulièrement nécessaire. Son champ est large. Il va de la coordination des politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre à la coopération financière, technique ou scientifique, en passant par les politiques et actions d’adaptation au changement climatique. Cette coopération s’impose pour des raisons d’efficacité des politiques publiques, car si les États font peser des niveaux de contrainte différents dans ce domaine (on parle de « contrainte carbone »), ils risquent de provoquer les délocalisations des entreprises les plus émettrices vers les pays dont la législation est plus souple. Elle est aussi nécessaire pour des raisons éthiques. En effet, les pays qui paient le plus lourd tribut au changement climatique ne sont pas ceux qui émettent le plus de gaz à effet de serre. Bien souvent, ils ne disposent pas non plus des capacités pour les affronter et ont besoin de l’appui des pays industrialisés.
Lancée à la fin des années 1980, la coopération internationale a d’abord donné naissance à la création du GIEC, puis à un droit international du climat composé d’un ensemble de règles conventionnelles et coutumières, mais aussi à un certain nombre d’institutions dédiées. Ce droit international du climat, qui s’est, depuis les origines, considérablement densifié et développé, revêt une importance croissante à au moins quatre égards. Premièrement, la préoccupation climatique s’intègre de manière de plus en plus transversale à un grand nombre de branches du droit international, ce qui se traduit par une « climatisation » progressive de celui-ci. Deuxièmement, le droit international du climat influence de manière croissante les autres échelons d’action des politiques publiques – européen, national ou même local. Troisièmement, le droit international du climat touche de plus en plus fortement les entreprises. Quatrièmement – et non sans lien avec le point précédent –, la médiatisation de plus en plus importante des conférences annuelles sur le climat fait naître de fortes attentes dans les opinions publiques, qui sont ainsi devenues familières de l’accord de Paris de 2015, ONG et mouvements citoyens se mobilisant désormais pour[...]
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Écrit par
- Sandrine MALJEAN-DUBOIS : directrice de recherche au CNRS, Centre d'Études et de recherche internationales et communautaires, Aix-en-Provence
Classification
Médias