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ROMANO-GERMANIQUES DROITS

Sources du droit

Indépendamment de la structure des différents droits, un facteur très important d'unité est constitué par l'identité des conceptions touchant les sources du droit.

Le rôle du législateur

Les juristes des divers pays de la famille romano-germanique mettent au premier plan, parmi ces sources, la loi. La chose est bien connue ; cette affirmation est presque un lieu commun. On en comprend pourtant mal le sens, souvent, et il est utile d'en préciser la portée. L'essentiel est que, par l'effet du travail auquel les juristes se sont livrés pendant des siècles, les droits romanistes se sont écartés de la casuistique primitive. Une théorie nouvelle des sources du droit a été mise en œuvre ainsi qu'une méthode nouvelle d'application. Il apparaît comme normal que la règle du droit, recherchée jadis dans les textes romains, ait été formulée hier par la doctrine, et le soit aujourd'hui par le législateur ; de ce fait elle s'élève inévitablement à un niveau de généralité supérieur à celui qu'elle aurait si elle était formulée par les juges. La méthode des juristes est dans ces conditions devenue une méthode d'interprétation, en place de la méthode des distinctions qui prévaut dans les pays où le droit est de formation jurisprudentielle.

Il faut néanmoins se garder d'exagérer le rôle du législateur et de penser qu'il est exclusif. On a été tenté de le faire au lendemain de la codification. En présence des textes, très compréhensifs, qui venaient d'être promulgués par le souverain dans les divers pays, on a été enclin à confondre le droit et la loi, et à voir dans cette dernière la source exclusive du droit. Cette manière de voir, qui paraissait en accord avec la conception de la démocratie alors en vogue, a triomphé en France au xixe siècle avec l'école de l'exégèse, et elle domine aujourd'hui encore la théorie dans les pays à régime d'inspiration marxiste. La jurisprudence des tribunaux, cependant, ne s'y est jamais ralliée, et aujourd'hui, en Allemagne fédérale comme en France, on est revenu à des manières de voir plus conformes à la tradition.

Jurisprudence et doctrine

La loi – Corpus juris civilis jadis, codes à notre époque – précise de nombreuses solutions, et elle fournit aux juristes la base même de leur raisonnement ; jurisprudence et doctrine n'en conservent pas moins un rôle qui, en maintes circonstances, pourra être de premier ordre. Il en est ainsi pour deux raisons. Il arrive en premier lieu, en nombre de cas, que le législateur s'exprime, de propos délibéré, en des termes généraux qui laissent à l'interprète un large pouvoir d'appréciation. Il parle de faute ou de préjudice, de bonne foi, de circonstances atténuantes, d'état de nécessité ou de détournement de pouvoir, et laisse l'interprète déterminer, en fonction de la situation de fait, le sens qu'il convient d'assigner à ces notions ; d'autres fois même, allant plus loin, il confère à l'interprète des pouvoirs d'équité et l'invite à appliquer la solution que, dans l'espèce, il estimera la plus juste. Sous le couvert de telles formules, doctrine et jurisprudence peuvent, en fait, jouer un rôle important dans l'évolution du droit ; il suffit de mentionner la manière dont est conçue aujourd'hui, en France, l'« injure grave » qui permet à un époux d'obtenir le divorce.

En dehors même du cas où le législateur a voulu conférer à l'interprète un certain pouvoir d'appréciation, il convient en second lieu de considérer que le processus d'interprétation, nécessaire pour l'application des règles formulées par le législateur, n'est pas gouverné par des règles rigides ; sous couleur d'interprétation, on peut en nombre de cas modifier le sens originaire que la règle, par[...]

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  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris

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