DRONES

Les premiers drones opérationnels

Mais c’est lors de la Seconde Guerre mondiale, devant les importantes pertes de l’aviation d’observation de chacun des antagonistes, que l’idée de développer des engins d’observation sans équipage (ni pilote ni observateur), en vue d’applications opérationnelles, a vu le jour. Toutefois, la sensibilité au brouillage de leurs systèmes de guidage rendait leur emploi difficile, voire impossible.

L’arrivée de l’informatique dans les années 1960 a alors permis d’envisager des engins autonomes, capables d’opérer au-dessus d’une zone donnée afin d’y recueillir de précieuses informations. C’est à cette époque que sont apparus en France les premiers drones européens, tel le R20 développé par la société Nord-Aviation et dérivé de l’engin cible CT20 utilisé comme cible pour les avions de chasse ou les missiles. Destiné à la surveillance des champs de bataille, ce drone de reconnaissance R20, opérationnel de 1966 à 1976, est muni d’un programme de vol interne, ce qui le rend insensible aux brouillages.

Depuis cette époque, les progrès considérables réalisés dans des domaines tels que l’informatisation, la robotique, l’optronique, l’imagerie radar ou encore la transmission de données ont permis d’étendre l’utilisation des drones à des missions de plus en plus diversifiées. De plus, le concept de conflit « zéro mort », d’origine américaine – en réalité le souhait d’une stricte limitation des pertes humaines –, ne peut qu’amplifier l’emploi de ces engins.

Quelques étapes clés de l’histoire des drones

La première utilisation militaire à grande échelle des drones a eu lieu lors de la guerre du Vietnam. En effet, à partir du milieu des années 1960, les Américains ont recours aux drones Firebee, développés par Teledyne-Ryan, pour localiser les rampes de lancement des missiles sol-air soviétiques SAM-2 des forces nord-vietnamiennes. Quelque 3 500 missions effectuées par des drones américains ont été recensées tout au long de ce conflit.

En 1973, lors de la guerre du Kippour, Israël, autre acteur majeur en matière de drones, sature et leurre les défenses aériennes égyptiennes installées le long du canal de Suez au moyen d’un grand nombre de drones de faible coût, et donc non réutilisables. Puis, en 1982, pendant l’opération Paix en Galilée, Israël utilise ces mêmes moyens pour détecter et leurrer les batteries antiaériennes installées par la Syrie au sud du Liban.

En 1991, lors de la guerre du Golfe, les Américains se servent du drone Pioneer pour la surveillance de jour et de nuit, l’acquisition des objectifs, les réglages de l’artillerie… Ces drones ont effectué plus de 500 missions. Au cours de ce même conflit, les Britanniques ont mis en œuvre le drone Phoenix, et les Français le drone Mart (mini-avion de reconnaissance télépiloté).

Pendant les conflits en ex-Yougoslavie (1991-1999), des drones américains de nouvelle génération, construits par General Atomics et appelés Predator, font leur apparition. De son côté, l’armée française effectue plusieurs dizaines de missions de surveillance et d’observation au moyen des drones CL-289, développés par E.A.D.S. (European Aeronautic Defence and Space Company), et des drones Crécerelle, mis au point par Sagem (Société d’applications générales d’électricité et de mécanique).

Depuis le début des années 2000, le rôle des drones s’est sans cesse accru ; ils occupent désormais une place centrale dans les opérations militaires. En 2003, lors de la deuxième guerre d’Irak, les Américains ont utilisé des drones comme leurres pour que la défense aérienne de Bagdad se découvre. Lors du conflit en Afghanistan (2001-2014), plus de 600 drones de types variés ont été mis en œuvre, certains étant armés de missiles ou de bombes à guidage laser. Depuis 2013, la France déploie des drones M.A.L.E. (moyenne altitude et longue endurance) non armés pour ses opérations militaires au Mali et dans la bande sahélienne.

L’utilisation, par les Américains et les Israéliens, de drones armés s’est considérablement développée ces dernières années, dans des opérations de combat, en Afghanistan, à Gaza ou au Yémen, ce qui a mis en relief des préoccupations d’ordre moral ou juridique, en raison du risque de dégâts collatéraux envers des civils, tués ou blessés de façon accidentelle dans ce type d’attaques.

Parallèlement à leurs missions dans les conflits armés, les drones militaires servent à sécuriser de grands événements. Ainsi, à la fin de 2003, la surveillance des réunions du G8 à Évian a été en partie assurée par des drones français Hunter, d’origine israélienne, mis en œuvre par l’armée de l’air. En juin 2004, les mêmes drones Hunter ont été déployés en Normandie lors des cérémonies de célébration du 60^e anniversaire du débarquement. Dix ans plus tard, lors des cérémonies des soixante-dix ans du débarquement en Normandie, ce sont des drones Harfang, successeurs des Hunter, qui ont surveillé les différents sites.

En 2013, la Fédération professionnelle du drone civil (F.P.D.C.) a été créée en France. Cette association, régie par la loi de 1901, fédère les acteurs privés et institutionnels dans le secteur du drone français, notamment les constructeurs et les opérateurs.

En 2014 et 2015, la presse a fait état du survol mystérieux de plusieurs sites sensibles français (diverses centrales nucléaires ; base militaire de l’île Longue, située dans la rade de Brest et qui abrite les sous-marins nucléaires de la force de dissuasion française ; centre de télécommunications de la Marine à Sainte-Assise en Seine-et-Marne…) et de plusieurs quartiers de Paris, par plusieurs petits drones inconnus de type hélicoptère multirotor.