DRUIDES
Une caste sacerdotale
Détenteur de l'autorité spirituelle, le druide a aussi prééminence sur le pouvoir temporel, représenté par le roi avec qui il forme couple ; il est l'intermédiaire obligé entre les dieux et le roi, celui-ci jouant le même rôle entre le druide et la société. Le roi rend la justice, mais c'est le druide qui dit le droit. Le druide n'est astreint à aucune obligation, fiscale ou militaire, mais il peut porter les armes et faire la guerre quand bon lui semble (le druide guerrier est un personnage classique de l'épopée irlandaise). C'est le druide qui prononce les geasa, « injonctions » ou « interdits » qui enserrent tous les individus – surtout le roi – dans un réseau strict de défenses et d'obligations : en Ulster, par exemple, on ne devait pas parler avant le roi et le roi ne devait pas parler avant le druide. Mais le druide est au service du roi, à qui il doit le conseil, l'information ou la prédiction dans l'intérêt du royaume.
La solidarité intime du roi et du druide suffit à expliquer qu'après la conquête romaine le druide ait disparu en Gaule : l'adoption par les Gaulois du système politique romain fondé sur le municipium lui enlevait toute raison d'existence. Aussi le druidisme, malgré sa force initiale, a-t-il décliné lentement. Les édits de Tibère et de Claude, qui englobaient dans une même réprobation druides et mathematici, ne sont donc pas la cause déterminante de cette disparition, pas plus que les griefs qu'on leur fait concernant les sacrifices humains, dont rien ne prouve qu'ils aient eu la fréquence et l'ampleur qu'on leur a attribuées.
Il est acquis que les druides sont les représentants celtiques d'un sacerdoce indo-européen. Leur nom s'explique par le celtique dru-wid-es, « les très savants », et non par l'étymologie analogique du grec drûs (« chêne »), due à Pline l'Ancien. Les Grecs, les Romains, les Germains ont eu des collèges de prêtres, mais les Celtes sont les seuls, avec les hindous, à avoir possédé une classe sacerdotale hiérarchisée et organisée. Les druides ne sont pas des prêtres préceltiques non plus que de simples « philosophes », encore moins des chamanes ou des sorciers. Les textes insulaires apportent une information abondante sur les techniques magiques, incantatoires ou divinatoires, voire médicales, utilisées par les druides. Mais ils sont pratiquement muets sur le rituel, comme les textes antiques. Une des exceptions les plus notables est le récit de Pline (Histoire naturelle, XVI, 249) concernant la cueillette du gui, accompagnée du sacrifice de deux taureaux : il s'agit d'un rituel d'élection royale dont nous avons la contrepartie et le complément en Irlande.
Mais l'on est bien renseigné sur les conceptions religieuses du druidisme, au moins dans ce qu'elles ont de spécifique, c'est-à-dire notamment en ce qui concerne l'écriture, le temps et l'Autre Monde, l'immortalité.
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Écrit par
- Christian-Joseph GUYONVARC'H : professeur de celtique à l'université de Rennes-II-Haute-Bretagne
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Média
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