DUCHAMP DU SIGNE, Marcel Duchamp Fiche de lecture
Physique et mécanismes du langage
Parmi les textes les plus célèbres de Duchamp, les calembours et les contrepèteries qu'il publia ici et là dans diverses revues, sous le pseudonyme de Rrose Sélavy, sont une autre manière d'expliquer les articulations qu'il met en place entre le langage et les objets. Les titres des objets sont partie intégrante de l'œuvre et, s'ils n'expliquent pas toujours l'objet, c'est qu'ils pointent également vers une tout autre réalité : celle de la plasticité du langage, lequel n'est pas véritablement de la littérature ni véritablement un objet d'art. Ce qui conduira Duchamp à présenter sous forme de traits d'esprit des phrases comprises comme des éléments poétiques hybrides : « Question d'hygiène intime : Faut-il mettre la moelle de l'épée dans le poil de l'aimée ? » ; « À charge de revanche, à verge de rechange » ; « Il faut dire : la crasse du tympan et non le Sacre du Printemps » ; « Du dos de la cuillère au cul de la douairière ». Selon une singulière démarche, Duchamp adopte simultanément dans ce genre de « texticules » (comme il les appelle encore), une sorte d'approche scientifique par laquelle il cherche à mettre au jour les mécanismes du langage et une totale liberté lui permettant de jouer avec la physique sonore, écrite, musicale et rythmique du langage pour nous le montrer sous un autre éclairage et en dégager le caractère conventionnel, voire absurde. Cette approche du langage par le nonsense, comme l'autre face du langage considéré comme clair, précis et rationnel, permet de comprendre d'autant mieux le nonsense des œuvres visuelles et plastiques de Marcel Duchamp.
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Écrit par
- Jacinto LAGEIRA : professeur en esthétique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, critique d'art
Classification
Média