EAST SIDE STORY
Proposée par le paléo-anthropologue Yves Coppens dès 1980, l'East Side Story est un scénario original qui explique l'origine de l'homme en se fondant non seulement sur des fossiles d'hominidés mais aussi sur des données chronologiques, environnementales et géographiques d'une région, la vallée du Rift. Et, pourtant, seul l'aspect géographique de cette théorie a été retenu et résumé ainsi : l'homme serait né à l'est du Rift, en Afrique orientale.
Coppens avait constaté que les hominidés les plus anciens étaient tous situés en Afrique orientale, dans la vallée du Grand Rift africain, et que les restes de grands singes n'étaient jamais observés sur les sites renfermant des hominidés. Aujourd'hui, tous les grands singes actuels vivent à l'ouest du Rift ou sur sa marge occidentale. Pour Coppens, le Rift avait peut-être fonctionné comme une barrière écologique et géographique. Au Miocène, les grands singes auraient été largement répandus en Afrique orientale et centrale. Avec l'ouverture du Rift, cette population primitive aurait été divisée : celle qui se déplaça vers l'est s'adapta à des conditions plus sèches et devint bipède, alors que celle qui demeura à l'ouest resta inféodée à la forêt et donna naissance aux grands singes actuels. Lors de la publication de sa théorie, en 1983, Coppens datait la divergence grands singes-hominidés de 7 à 8 millions d'années (âge qu'il vieillira, l'année suivante, à 10 millions d'années). Pour lui, c'est bien la formation de la vallée du Rift qui a engendré les changements climatiques responsables de la barrière écologique. L'apparition des hominidés aurait donc été liée aux variations du climat.
Cette théorie comporte trois volets : géographique, chronologique et écologique. Le premier (le lieu d'origine de l'homme) est probablement le plus discutable, en raison de la difficulté à isoler un berceau précis d'origine pour une lignée fossile dont la répartition est plus ou moins grande à cause de la marge d'erreur dans la résolution des âges géochronologiques. Pour qu'il soit invalidé, il faut trouver ou bien des hominidés à l'ouest du Rift, dans des terrains aussi vieux que 8-10 millions d'années, ou bien des grands singes de type moderne à l'est, dans des terrains aussi vieux que ceux où vécurent les hominidés les plus anciens. La mise au jour d'Australopithecus bahrelghazali au Tchad (site de Koro Toro), en 1995, à quelque 2 500 kilomètres à l'ouest de la vallée du Rift, ne peut remettre en cause cette théorie, car cet hominidé est trop jeune (env. 3,5 millions d'années). La découverte, toujours au Tchad (Toros Menalla), en 2001, de Sahelanthropus tchadensis (6-7 millions d'années), plus connu sous le nom de Toumaï, pourrait mettre à mal l'aspect géographique de la théorie, si l'appartenance de cet hominoïde aux hominidés se confirme. Il en est de même pour la dent chimpanziforme découverte au Kenya (site de Ngorora) et âgée de 12,5 millions d'années. Toutes ces découvertes fossiles récentes, ainsi que les travaux concernant les paléoenvironnements africains, attestent toutefois une divergence grands singes-homme ancienne (antérieure à 6 millions d'années) et confirment les données environnementales de cette théorie, c'est-à-dire l'existence d'un assèchement à l'est du Rift, mélange d'un phénomène local et global.
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Écrit par
- Brigitte SENUT : professeure de première classe au Muséum national d'histoire naturelle
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HOMINIDÉS
- Écrit par Brigitte SENUT
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