EAU Les défis de l'eau
Nourrir la planète
Au xxie siècle, le problème essentiel posé à propos de l'eau est de nourrir la planète (M. Griffon, 2006). Les besoins augmentent avec l'explosion démographique incontrôlée. Aujourd'hui, trois céréales, le blé, le maïs et le riz, chacune à raison de 700 millions de tonnes par an, fournissent 60 p. 100 de la nourriture mondiale. La première chose à faire est d'augmenter les rendements, de mieux utiliser l'eau (selon le slogan more crop per drop), c'est-à-dire d'éviter les pertes, ou de choisir des cultures plus productives à quantité d'eau égale (tabl. 1). On espère ainsi, au mieux d'ici à 2050, des économies d'eau de l'ordre de 20 p. 100, notoirement insuffisantes par rapport aux besoins.
On pourrait penser qu'une autre solution est d'augmenter les surfaces d'agriculture irriguée, qui produisent par hectare en général plus que celles en agriculture pluviale. Au rythme actuel d'augmentation de 1,34 million d'hectares par an de ces surfaces irriguées, on passerait de 264 millions d'hectares aujourd'hui à 331 millions d'hectares irrigués en 2050, ce qui est aussi notoirement insuffisant. Il faudrait décupler le rythme actuel d'aménagement pour répondre aux besoins croissants, ce qui est peu envisageable. En effet, au prix actuel des céréales, la rentabilité des investissements n'est pas assurée et les financeurs institutionnels (Banque mondiale, F.M.I...) se détournent de ces grands aménagements de retenues d'eau et périmètres irrigués, qui, par le passé, ont également eu, pour certains d'entre eux, des conséquences environnementales désastreuses et une efficacité douteuse.
La solution vers laquelle on se dirige est une très forte augmentation de l'agriculture pluviale, qui occupe actuellement 1,34 milliard d'hectares, et devrait croître d'ici à 2050 de 1 milliard d'hectares. De telles surfaces cultivables en agriculture pluviale semblent disponibles, mais pas partout (tabl. 5) : l'Asie et le Moyen-Orient/Afrique du Nord sont très proches des limites d'utilisation de leurs sols, alors que ces deux zones sont en très forte expansion démographique. En revanche, l'Afrique subsaharienne, également en très forte expansion démographique, a largement les sols nécessaires pour produire la nourriture dont elle a besoin. L'Amérique latine, puis les pays de l'O.C.D.E. et la Russie auraient les moyens de produire la nourriture nécessaire. On sait que le Brésil, l'Argentine s'y préparent, et que les États-Unis sont déjà les premiers exportateurs mondiaux de denrées alimentaires. Selon ce scénario, on se dirigerait vers un énorme effort de défrichement des zones actuellement non cultivées mais cultivables, qui sont aujourd'hui occupées par la végétation naturelle (forêt, steppe, pampa...). Cela s'accompagnera nécessairement de fortes atteintes aux écosystèmes naturels et d'une réduction massive de la biodiversité, mais que faire ? Laisser les nouveaux habitants mourir de faim ? Une autre conséquence sera que de nombreux pays perdront tout espoir d'autosuffisance alimentaire, et seront dépendants d'autres pays pour leur alimentation, avec les risques de pressions politiques que cela implique, et les tensions qui pourront en résulter sur les prix des denrées agricoles en cas de pénuries.
Il faut ajouter à cela que l'agriculture sera aussi sollicitée pour la production de biomasse à des fins énergétiques, ce qui engendrera une tension supplémentaire sur la production alimentaire, mais fait dire aussi que la contribution des bioénergies aux besoins énergétiques mondiaux sera, en tout état de cause, modeste.
Quant aux pays « riches » en eau, comme la France, il peuvent ici ou là, en fonction des saisons, des aléas climatiques,[...]
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Écrit par
- Ghislain de MARSILY : professeur émérite à l'université de Paris-VI-Pierre et-Marie-Curie, membre de l'Académie des sciences, de l'Académie des technologies et de l'Académie d'agriculture de France
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