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ECKSTINE WILLIAM CLARENCE dit BILLY (1914-1993)

Billy Eckstine - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Billy Eckstine

L'Histoire avait donné rendez-vous à Billy Eckstine  : il fut en effet le premier chanteur noir à « faire la une » du magazine américain Life. Rien ne prédisposait pourtant cet aimable chanteur de ballades et de romances commerciales à participer à l'épopée du jazz. Mais qui lui contesterait l'éclatante audace d'avoir, avant tout le monde, cru au succès public du bop et d'avoir, pendant plus de trois ans, rassemblé dans un orchestre devenu légendaire l'élite de l'avant-garde be-bop de l'époque ? C'est moins pour son talent personnel que pour avoir eu le courage d'oser que Billy Eckstine a empoché son passeport pour la gloire.

William Clarence Eckstein, dit « Billy » Eckstine (ou encore « Mr B »), naît le 8 juillet 1914 à Pittsburgh (Pa.). Il fait ses études à Washington. Au début des années 1930, il remporte un concours de chant amateur. C'est sans doute ce qui décide de sa carrière. On le retrouve donc comme chanteur-animateur dans divers clubs de Buffalo, Detroit, Washington et Chicago. En 1939, il entre pour cinq ans dans l'orchestre d'Earl Hines. Billy Eckstine en devient rapidement l'attraction ; il sait en outre, à l'occasion, jouer de la trompette, de la guitare, du trombone ou du saxophone. Il y rencontre le saxophoniste et chanteur Budd Johnson, arrangeur de la formation avant de devenir le sien puis celui de Woody Herman et de Dizzy Gillespie. Leur commune passion pour le bop contribue à intégrer dans l'orchestre ces deux musiciens d'exception que sont Sarah Vaughan et Charlie Parker. C'est ensemble encore une fois qu'ils fondent, en 1944, leur propre big band, cet orchestre mythique où se côtoyaient à la trompette Dizzy Gillespie, Fats Navarro, Miles Davis et Kenny Dorham, au saxophone ténor Lucky Thompson, Gene Ammons, Dexter Gordon et Wardell Gray, au saxophone alto Sonny Stitt et Charlie Parker, au saxophone baryton Leo Parker, à la basse Tommy Potter et Oscar Pettiford, au piano John Malachie, à la batterie Art Blakey, et la chanteuse Sarah Vaughan. Bref, la fine fleur de la musique nouvelle et une collection de génies rarement égalée. Les arrangements sont signés Budd Johnson, Tadd Dameron et Jerry Valentine. C'est chez Billy Eckstine que Gene Ammons et Dexter Gordon commencent ces fameuses batailles de saxophones (chases) qui, pendant des années, vont faire fureur dans les jam-sessions. Les enregistrements de cette fabuleuse formation font malheureusement la part trop belle au chanteur-leader, dont le style nous paraît aujourd'hui bien ampoulé.

Mais, avec la dissolution de l'orchestre en 1947, il faut bien redescendre sur terre. Sous contrat avec la M.G.M., Billy Eckstine se fait chanteur populaire. Il ne reviendra à un répertoire plus spécifiquement jazzique qu'au milieu des années 1950. Au cours des années 1960, il connaît une éclipse prolongée qui l'amène à se produire dans des clubs de Las Vegas. Il revient sur scène à la fin des années 1970, et enregistre en 1987 un album avec Helen Merrill. Mais son heure est passée. Il est bien loin, le temps où Billy Eckstine jouait un rôle central dans le développement du bop et la défense des musiciens qui l'illustraient. Il ne reste plus qu'un chanteur ordinaire qui n'a pu trouver son propre chemin vers l'éternité. C'est presque oublié que disparaît Billy Eckstine, à Pittsburgh, le 8 mars 1993.

— Pierre BRETON

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Billy Eckstine - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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