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AMARĀVATĪ ÉCOLE D'

Le style de l'Andhradeśa

Quoi qu'il en soit de ces fluctuations dans le temps et dans l'espace, il reste que l'école d'Amarāvatī constitue un ensemble cohérent, un tout qui possède une forte personnalité et qui eut une grande influence sur l'art indien.

Certes, cette personnalité s'est formée aux anciennes leçons de Bhārhut-Sāñcī, mais n'en fut pas moins attentive à ce qui se faisait dans l'Inde, au Gandhāra, à Mathurā, etc. Elle eut des contacts avec l'Occident, soit indirects, par l'antique voie du nord-ouest et des royaumes « hellénisés », soit par voie maritime et « romaine » ; des fouilles ont confirmé l'existence de ports romanisés sur la côte sud-orientale de l'Inde et l'activité des échanges commerciaux. Ces ouvertures expliquent, en particulier, les modifications dans l'architecture du stūpa (disparition de la vedikā) issues du Gandhāra ou de Mathurā, l'apparition de motifs iraniens, hellénistiques, romains, comme la guirlande soutenue par de petits personnages, le trône aux lions, le trône supporté par des pattes de fauve, le rinceau d'acanthe à tiges minces.

Mais l'Andhradeśa a trouvé, forgé, fait resplendir un grand style. L'architecture manifesta, avec une floraison de stūpa, dont certains sont imposants, une ampleur dont on n'a plus, sur les reliefs, que les reflets. Une technique sculpturale très sûre s'affirma. De grands médaillons (et demi-médaillons) traduisent le symbolisme du lotus dans des rangées multipliées de pétales ; les fleurs se détachent souvent sur de larges feuilles ondulées, dentelées, se recourbant en crochets, du plus heureux effet. « Vases d'abondance » d'où jaillit et s'épanouit un feuillage, « stūpa figurés », admirablement ouvragés, symbolisant le Parinirvāna ou plus généralement le Buddha et son enseignement, guirlandes en gros rouleaux, rinceaux feuillus, torsades frangées, perlages ; tout, des plus complexes ensembles aux plus infimes détails, témoigne d'une décoration parvenue à un extrême raffinement, mais dont la richesse ne compromet jamais un équilibre mesuré. Des animaux se meuvent, débordant de vitalité et de fantaisie. Les scènes allient à une savante composition, un dynamisme puissant. Les corps, galbés en lignes très pures, se courbent avec grâce ou manifestent leur ardeur. Peut-être la qualité majeure de cet art d'Amarāvatī est-elle cette union d'antagonismes équilibrés, ce « couple de forces » que forment le jaillissement renouvelé de la vie, rendu par les descriptions familières, par le mouvement des corps, et l'élan de la spiritualité, qu'évoquent la sérénité du Buddha ou l'appel de son symbole, la pureté des formes, la retenue dans les gestes et dans l'ordonnance générale.

En outre, nombre de reliefs apportent une information, particulièrement détaillée et fidèle, sur la vie de l'époque, à la cour royale, à la maison, dans les rues, en forêt, sur les constructions publiques et privées, sur le mobilier, les costumes et les parures, les moyens de transport, sur l'activité culturelle autour des stūpa, etc. Complétés par des inscriptions lapidaires qui font état de fondations et donations pieuses, ils constituent une source précieuse pour la connaissance du bouddhisme. On peut ainsi trouver trace de transformations, voire d'innovations, survenues dans la pensée religieuse. N'oublions pas que c'est à ce moment que se fit jour et que s'établit la conception d'un Buddha qui n'est plus seulement le Maître humain enseignant le chemin de la Connaissance, mais un Être transcendant, placé même au-dessus des dieux (devātideva).

L'école d'Amarāvatī a rayonné dans l'Inde, et au-delà. Sa marque se décèle, notamment, sur les ivoires de Begrām, dans les reliefs de Kārlī,[...]

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Écrit par

  • : maître de recherche honoraire au C.N.R.S., conservateur honoraire des musées de France

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Média

Scène de vénération des symboles du Buddha, art de l'Inde - crédits :  Bridgeman Images

Scène de vénération des symboles du Buddha, art de l'Inde

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