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DARMSTADT ÉCOLE DE

Le nazisme avait fait perdre à l'Allemagne sa vocation de laboratoire musical : totalitarisme et esprit de recherche allaient évidemment mal ensemble. Des compositeurs comme Arnold Schönberg, Alban Berg, Anton von Webern, Kurt Weill, Ernst Křenek, Franz Schreker et même Paul Hindemith avaient été qualifiés de « dégénérés », leur musique (Entartete Musik : « musique dégénérée ») ayant été considérée comme un outrage à la culture allemande.

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les compositeurs désireux d'écrire une musique nouvelle eurent la possibilité de se retrouver chaque été dans la ville de Darmstadt (en Hesse), en participant aux « cours d'été internationaux pour la nouvelle musique » (Internationale Ferienkurse für Neue Musik) organisés dès 1946 sous l'égide du critique musical Wolfgang Steinecke.

Les écoles dans l'École

Creuset de la nouvelle musique, lieu de rencontre privilégié, centre à la fois d'information, de diffusion (par l'organisation de concerts), de production et d'enseignement (cours de composition, de direction d'orchestre, d'esthétique musicale, d'acoustique et d'interprétation instrumentale), Darmstadt, situé en Allemagne, avait valeur de symbole : ce lieu apparaissait comme une réhabilitation de ce pays en déshérence qui, dans l'entre-deux-guerres, avait poussé hors de son territoire le fleuron de la création musicale.

Les cours de Darmstadt se déroulaient uniquement l'été. Les compositeurs qui venaient y enseigner n'étaient pas exclusivement des tenants du credo sériel mais ils étaient tous hantés, dans cet après-guerre, par la nécessité de trouver un langage sonore qui convienne à une époque brûlée par le malheur. Parmi les professeurs de composition invités, il y eut notamment René Leibowitz en 1948, Edgar Varèse en 1950, Olivier Messiaen en 1949 et 1952. Hermann Scherchen a assuré des cours en direction d'orchestre et Theodor W. Adorno des séminaires d'esthétique et de philosophie.

Au-delà de la création, Darmstadt fut d'abord le lieu où toute une génération de jeunes compositeurs s'employa à découvrir et à faire découvrir les compositeurs de la seconde École de Vienne (Schönberg, Berg et Webern). Parmi eux, on trouve les Français Pierre Boulez et Jean Barraqué, les Italiens Luciano Berio, Luigi Nono, Bruno Maderna, Franco Donatoni, l'Allemand Karlheinz Stockhausen, le Belge Henri Pousseur, le Germano-Argentin Mauricio Kagel. Même si chacun d'eux mena des recherches esthétiques et stylistiques qui correspondaient à leur sensibilité propre, tous avaient en commun le besoin de clarifier, de comprendre, d'approfondir ou de développer l'expérience sérielle, que ce soit pour la continuer ou pour la rejeter définitivement.

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

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