MANNHEIM ÉCOLE DE
Mannheim a été, au xviiie siècle, un centre musical dont le rayonnement dépassait largement les limites du Palatinat ; l'orchestre de la cour du prince-électeur Karl Theodor était considéré comme le meilleur de l'Europe par le nombre et la grande qualité des instrumentistes qui le composaient ; le musicologue anglais Burney le qualifiait, en 1772, d'« armée de généraux », et le jeune Mozart, lors de son séjour à Mannheim, apprécia fort le volume sonore et la beauté des exécutions, dont il n'avait pas connu l'équivalent à Salzbourg ou en Italie.
Les compositeurs de Mannheim, ayant été eux-même le plus souvent membres de l'orchestre, exécutants et virtuoses, disposaient grâce à cet ensemble exceptionnel d'une précieuse possibilité de réaliser des effets inusités dans le jeu de l'instrumentiste et dans l'orchestration. C'est ainsi que s'est développé un nouveau style musical, dont Mannheim n'est d'ailleurs pas le seul berceau, les mêmes tendances apparaissant alors en Italie, à Vienne, en Allemagne du Nord. L'emploi des nuances (forte, piano) s'accentue et se généralise ; la forme sonate avec ses deux thèmes s'affirme jusque dans le premier mouvement de la symphonie ; le groupe des instruments à vent gagne en importance dans l'orchestre. Le rôle prépondérant des « Mannheimer » dans cette évolution est incontestable.
Un lieu privilégié
Les antécédents
Un goût très vif pour la musique instrumentale existait au xviiie siècle en Allemagne ; rois, princes, évêques, électeurs, seigneurs grands et petits rivalisaient pour avoir à leur cour des musiciens de qualité, et entretenaient orchestres de concerts et chœurs de chapelle. Les plus riches avaient maître de chapelle, maître des concerts de la cour, compositeur, organiste, et toute une troupe d'instrumentistes et de chanteurs ; les plus pauvres transformaient en musiciens leurs domestiques, et cochers, valets de chambre ou d'écurie venaient le soir, en présence du maître ou même avec son concours, exécuter quatuors, sonates, trios ou symphonies. L'auditoire étant toujours le même, le maître de chapelle ou le compositeur de la cour devait varier les programmes, ce qui explique l'abondance surprenante de la production des compositeurs de cette époque. La gravure musicale étant encore assez rare et coûteuse, beaucoup d'œuvres restèrent manuscrites et se sont perdues depuis ; d'autres sommeillent encore, dispersées dans les archives seigneuriales ou les bibliothèques publiques allemandes.
L'histoire de la chapelle de Mannheim commence en 1717. Le prince-électeur Karl Philipp, qui avait résidé à Innsbruck comme gouverneur, s'installe définitivement à Mannheim en 1720 et y amène une partie de sa chapelle d'Innsbruck ; seize des cinquante-cinq musiciens qui sont au début nommés à la cour de Mannheim viennent d'Innsbruck et apportent l'esprit et les traditions musicales du Tyrol autrichien. Ce sont surtout des joueurs d'instruments à vent. Une autre partie des musiciens nommés vient de la chapelle que le frère décédé de Karl Philipp avait constituée à Düsseldorf. Les premiers maîtres de concert qui se succèdent à la tête de l'orchestre de Mannheim sont d'origine diverse : Moravie, Silésie, Bruxelles, Roumanie. Ainsi la cour est dès ce moment un carrefour où convergent et s'allient des traditions musicales variées.
La vie musicale à Mannheim
Karl Theodor, qui accède au pouvoir en 1743, est un amateur d'art, et particulièrement de musique. Des artistes de tous pays vont venir à sa cour, attirés par son orchestre et son théâtre. Très attaché à la culture française, le prince cherche à imiter l'esprit parisien, surtout dans les domaines littéraire et philosophique, comme c'est le cas dans beaucoup de cours allemandes de l'époque.[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Nicole LACHARTRE : compositeur, fondatrice et directrice artistique de l'Association pour la collaboration des interprètes et compositeurs
Classification
Média
Autres références
-
CANNABICH CHRISTIAN (1731-1798)
- Écrit par Marc VIGNAL
- 353 mots
Né à Mannheim dans une famille de musiciens, Cannabich entre dès 1744 dans le fameux orchestre de cette ville, dont Johann Stamitz, l'année suivante, prendra la direction. Son père, flûtiste et hautboïste, donne des leçons de flûte au prince-électeur Karl Theodor. Jusqu'en juillet 1753, le jeune...
-
HOLZBAUER IGNAZ (1711-1783)
- Écrit par Marc VIGNAL
- 291 mots
Né à Vienne, Holzbauer, qui mène à Vienne des études de droit et de théologie, s'initie à la composition grâce au célèbre Gradus ad Parnassum du maître de chapelle impériale Johann Joseph Fux, qui, estimant ne rien avoir à lui apprendre de plus, lui conseille d'aller se perfectionner...
-
MÉLODRAME, musique
- Écrit par Jean MASSIN
- 469 mots
Dans la tragédie grecque, le mélodrame (de mélos, chant, et drama, acte) désigne le dialogue chanté entre le coryphée et un personnage. Le mot reparaît à la fin du xviiie siècle pour désigner un genre musical nouveau, non plus un dialogue chanté mais « un genre de drame dans lequel les...
-
ORCHESTRE
- Écrit par Michel PHILIPPOT
- 6 760 mots
- 6 médias
...timbre, chaque instrument, en fonction de sa propre individualité, tout en le faisant participer à l'ensemble. À la même époque, les symphonistes de l' école de Mannheim (Johann Stamitz, Franz Xaver Richter, Ignaz Holzbauer ; cf. école de mannheim) contribuèrent grandement à la formation de l'orchestre... - Afficher les 7 références