CERCLES CULTURELS ÉCOLE DES
Connue dans l'histoire de l'ethnologie sous diverses appellations — école de Vienne, école historico-culturelle ou école diffusionniste —, l'École des cercles culturels est centrée sur la notion de cercles culturels ou d'aires culturelles (Kulturkreise). Elle est fondée sur un certain nombre de principes que l'on peut résumer ainsi : les capacités d'invention humaine sont extrêmement limitées et l'innovation technique apparaissant dans un certain lieu se « diffuse » progressivement en gagnant de proche en proche ; le changement culturel se fait donc essentiellement par contact d'une culture à l'autre ; l'« emprunt culturel » est susceptible d'être déformé, transposé, symbolisé, et les conditions du passage d'une culture à une autre culture dépendent, en grande partie, des conditions écologiques ; les distances géographiques, si considérables soient-elles, n'ont pas de véritable importance pour cet emprunt ; enfin, on peut noter que les divers éléments d'une constellation culturelle donnée sont en situation d'interdépendance, de telle sorte que, lorsque l'un des thèmes caractéristiques d'un cercle culturel est identifié quelque part au sein d'une civilisation, on peut s'attendre, en principe, à retrouver le reste du complexe culturel.
À l'origine de cette tendance qui privilégie les phénomènes de contact culturel par rapport aux phénomènes d'évolution sur place, on trouve, d'une part, les recherches géographiques de Ratzel en Allemagne, d'autre part, des travaux muséographiques. Frobenius, à la fin du xixe siècle, apparaît comme le précurseur de la nouvelle école avec son ouvrage, Der Ursprung der Afrikanischen Kulturen ; puis les travaux d'Ankermann et surtout ceux de Fritz Graebner se trouvent fonder la méthode diffusionniste ; les recherches dirigées par le père Wilhelm Schmidt et ses collaborateurs, pour la plupart des missionnaires (Koppers, Schebesta), s'inscrivent plus tard dans cette ligne. L'école de Vienne a, par ailleurs, fait paraître la revue Anthropos qui a accueilli un très grand nombre d'enquêtes originales.
En Amérique, le diffusionnisme est surtout représenté par Wilssler, Radin et Spier. En Allemagne, Baumann et Westermann ont publié une importante synthèse sur les peuples et civilisations de l'Afrique et ont tenté, d'une manière évidemment trop systématique, une première classification générale des cultures africaines. En France, l'ethnologue franco-suisse Georges Montandon a utilisé systématiquement l'interprétation diffusionniste (L'Ologenèse culturelle, 1934). Enfin, signalons pour mémoire les excès qui confinent au ridicule des auteurs « hyper-diffusionnistes » britanniques, Elliot-Smith et Perry, pour lesquels toute création culturelle provient de la vallée du Nil ; à partir de ce foyer central, il y aurait eu une série de processus de « dégénération culturelle ».
En dépit des exagérations de quelques théoriciens et d'une certaine désaffection qui en a été la conséquence, le concept de cercles culturels demeure une acquisition intéressante de l'ethnologie, il affirme l'existence, au sein du polymorphisme apparent des cultures, d'une certaine logique interne qui sous-tend des constellations culturelles dont les divers éléments sont en situation d'interrelation. On peut penser que l'interprétation diffusionniste peut encore constituer, en la réinterprétant, un instrument fort utile pour la connaissance du monde moderne, où les relations interethniques et interculturelles prennent de plus en plus d'importance.
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Écrit par
- Jean POIRIER : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Nice, membre de l'Académie des sciences d'outre-mer
Classification
Autres références
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GRAEBNER FRITZ (1877-1934)
- Écrit par Jean POIRIER
- 271 mots
Fondateur, avec le père Wilhelm Schmidt, de l'école diffusionniste de Vienne, Graebner précéda néanmoins son collaborateur dans la formulation des principes majeurs de la nouvelle théorie. Il exposa sa thèse en 1911 dans Methode der Ethnologie (Heidelberg). Ses principaux ouvrages sont...