LÉGISTES ÉCOLE DES
Le légisme chinois fut à la fin du iiie siècle avant J.-C. la doctrine d'État de la première dynastie impériale, après avoir façonné les institutions de l'ancien pays de Qin au milieu du ive siècle. Responsable de la conception chinoise de l'absolutisme, il s'est développé au cours de la remise en question progressive de la féodalité, du début de la période des Printemps et Automnes (722 av. J.-C.) à la fin de celle des Royaumes combattants (221 av. J.-C.), dans le fil de tendances progressistes au réalisme politique, au pragmatisme économique, au rationalisme critique, qu'il faisait cependant dévier vers une sorte de machiavélisme more sinico. L'ambiguïté de cette doctrine est celle de la loi elle-même en Chine, qui, lorsqu'elle devient positive et commune pour tous, est ramenée à sa forme pénale la plus archaïque.
Signification du légisme chinois
Loi et rites dans la Chine ancienne
Dans la Chine ancienne, le cadre des institutions n'était pas légal mais rituel, et la loi, dont le nom fut appliqué à l'École des légistes, s'entendait primitivement de deux manières. D'une part, sous le nom de fa (norme) était proprement désignée la loi céleste, ordonnant non seulement les actions humaines mais aussi tous les autres phénomènes de l'univers. En tant que Fils du Ciel et titulaire de la souveraineté par mandat divin, le roi veillait à son application sur la terre ; il lui donnait une forme explicite dans les dispositions, notamment les dispositions rituelles, qu'il édictait, et qui visaient aussi bien l'ordre de la nature que l'ordre de la société. Ces dispositions, pour autant qu'elles reflétaient la loi céleste, pouvaient recevoir elles-mêmes le nom de fa, mais en un sens dérivé ; la norme au sens propre, prototype de toutes les lois naturelles et sociales, transcendait toute mesure politique ou technique, s'imposait universellement sans qu'aucune transgression fût possible, et se trouvait sanctionnée par la justice immanente comme les causes le sont dans leurs effets. D'autre part, sous le nom de xing (loi pénale) était désignée une catégorie de rites parmi les autres, celle des châtiments administrés par le pouvoir politique en vue de la répression de certains méfaits, pour la sanction desquels l'autorité humaine agissait délibérément au nom de la justice céleste. Cette loi-là était positive, promulguée par le souverain, mais ne visait que des fautes caractérisées, et ne s'appliquait qu'au peuple, traité en objet passif des dispositions rituelles, tandis que les aristocrates, considérés comme des sujets autonomes conscients de leurs devoirs, dignes d'éducation morale plutôt que de correction physique, restaient directement soumis aux sanctions de la justice immanente, dût celle-ci passer par les voies de réactions humaines spontanées. Tel était du moins le principe exprimé par le précepte que « les châtiments ne montent pas jusqu'à l'aristocratie, les rites ne descendent pas jusqu'au peuple ». Les légistes sont des praticiens et des théoriciens de la politique qui préconisèrent une extension telle de la loi pénale que celle-ci, se substituant partout et pour tous aux rites, devint loi unique et générale, adéquatement désignée dès lors par le nom de norme suprême, bien que restant positive. Le légisme fait ainsi du souverain non plus le mandataire du Ciel, mais un législateur absolu assortissant toutes les dispositions qu'il prend de sanctions pénales rigoureuses, applicables à tous ses sujets de quelque rang qu'ils fussent, balancées cependant par des récompenses consistant en gratifications et en promotions.
Sens de la substitution de la loi aux rites
La doctrine légiste, que fera sienne Qin Shihuang, fondateur en 221 avant J.-C. de l'Empire chinois, apparaît dans le courant de[...]
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Écrit par
- Léon VANDERMEERSCH : directeur d'études honoraire à l'École pratique des hautes études
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