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MATHÉMATIQUE ÉCOLE ÉCONOMIQUE

Les grandes étapes de l'économie mathématique

En Angleterre, à la fin du xviie siècle, William Petty prône l'usage du calcul pour rationaliser l'action publique. Il nomme « arithmétique politique » sa méthode, l'appliquant à ce que l'on appellerait aujourd'hui de l'économie, de la démographie et de la statistique descriptives (Political Arithmetick, 1690). On doit à ses disciples la loi de King, qui indique de combien varie le prix du blé quand la récolte s'écarte de tant de pour-cent de sa quantité moyenne.

En France, les physiocrates de la fin du xviiie siècle utilisent l'expression « science économique » pour revendiquer qu'il s'agit bien d'une science, aussi respectable que les sciences de la nature, qui entend prouver ses lois à la façon des géomètres, qui utilisent des calculs et des relations mathématiques. Ils s'intéressent à des concepts, tels le « produit net » ou les « avances », quantifiables. Ils calculent combien la nation gagnerait à adopter telle réforme, détaillant ce qui reviendrait à chacun en l'occurrence ; ils formalisent l'ensemble du système économique dans un Tableau économique (Quesnay, 1758) qu'ils considèrent comme leur réalisation la plus admirable.

Les économistes mathématiciens de l'époque classique sont surtout allemands, avec Hermann Gossen, Johann von Thünen, et français, avec Antoine Augustin Cournot et Jules Dupuit. Ces quatre auteurs publient au milieu du xixe siècle sans se connaître. Cournot est le plus novateur. Ses Recherches sur les principes mathématiques de la théorie des richessesparaissent en 1838, avec l'allure d'un manuel de microéconomie avant l'heure. L'essentiel est de formaliser des situations d'équilibre, chaque résultat ou hypothèse mathématique étant suivi d'une courte et limpide interprétation économique. Avec ce livre, l'économie mathématique quitte le monde des chiffres et des calculs élémentaires, pour celui de l'analyse et du calcul différentiel. La demande globale est, par exemple, pour la première fois définie et analysée comme une fonction : « Admettons donc que le débit ou la demande annuelle D est, pour chaque denrée, une fonction particulière F (p) du prix p de cette denrée. Connaître la forme de cette fonction, ce serait connaître ce que nous appelons la loi de la demande ou du débit. »

Pour la première fois intervient en économie une fonction non spécifiée, non pas une fonction particulière comme dans la loi de King mais une fonction inconnue F, destinée à rester inconnue et dont le seul fait de supposer l'existence permettrait de mieux comprendre les choses.

C'est à la faveur des courants marginalistes et néo-classiques, à partir de 1871, que les économistes mathématiciens commencent à faire école. Des auteurs comme le Français Léon Walras, l'Italien Vilfredo Pareto, l'Américain Irving Fisher, l'Anglais John Hicks, élaborent ainsi ce que l'on appellera plus tard la microéconomie.

Une autre mathématisation s'opère au xixe siècle, correspondant en partie à ce que l'on appellera plus tard la macroéconomie. Elle bénéficie de la publication de nouvelles statistiques économiques comme des indices de prix et de production, qui s'ajoutent aux données financières dont on disposait déjà. Il s'agit alors d'analyser ces données, de les comparer afin de comprendre l'origine et la nature des oscillations conjoncturelles. William Stanley Jevons avait entrepris de telles études dans les années 1860 pour expliquer la régularité des crises économiques. L'Américain Wesley Clair Mitchell systématise ce genre d'études empiriques à la fin du siècle.

Les deux tendances de l'économie mathématique, l'une théorique, l'autre empirique, ne font pas toujours bon ménage.[...]

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Écrit par

  • : professeur de sciences économiques à l'université de Paris-IX-Dauphine

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