TOSA ÉCOLE
École de peinture japonaise dont l'origine remonte au xive siècle. C'est la seule école à maintenir officiellement la tradition de la peinture japonaise (Yamato-e) élaborée aux époques Heian (ixe-xiie s.) et Kamakura (xiiie-xive s.). À partir du xve siècle le Yamato-e est détrôné par un nouveau style de peinture à l'encre inspiré par la Chine des Song et des Yuan, tandis que le déclin politique et financier de l'aristocratie, groupée autour de l'empereur, entrave l'activité des artistes de cour. Leur direction passe alors à la famille Tosa, qui assure ainsi la continuité de l'art traditionnel japonais.
Malgré la montée au pouvoir de la classe guerrière, le Bureau de peinture (Edokoro) se maintient en effet à la cour impériale de Kyōto. Occupant le poste de chef de ce bureau de façon héréditaire, la famille Tosa peut se vanter d'un très ancien héritage artistique et jouit du monopole de la plus haute position à laquelle puissent prétendre des artistes. Elle dirige aussi le Bureau de peinture de la cour militaire et bénéficie à la fois du patronage de l'aristocratie et de celui de la classe guerrière. C'est la plus puissante école du Yamato-e.
L'artiste le plus important de cette école et celui qui en établit le style pictural est Mitsunobu (1430 env.-1522). Son œuvre recouvre une grande variété de sujets : peintures bouddhiques, rouleaux narratifs (e-maki), grands paravents, portraits. Sa série de dix rouleaux verticaux représentant les Dix Rois des Enfers est exécutée en couleurs brillantes que ponctuent de puissants coups de pinceau. Par l'union des jeux d'encre dans la tradition chinoise et des vifs coloris du Yamato-e, Mitsunobu crée un effet totalement nouveau qui dominera la peinture japonaise pendant de nombreuse années. Mitsunobu aurait été inspiré par un maître de l'école rivale, Kanō Motonobu (1476-1559), le mari de sa fille. Ce mariage aurait d'ailleurs livré à Motonobu les secrets techniques de la peinture traditionnelle, ce qui lui aurait permis de faire la synthèse de deux styles différents. Parmi les plus célèbres e-maki de Mitsunobu, on citera l'Histoire du temple de Seisui (Seisui-ji Engi) et la Légende de Tenjin (Tenjin Engi) ; dans ces œuvres, l'artiste dépeint avec talent les activités humaines et la ferveur religieuse des paysans.
Son fils Mitsumochi (mort en 1559) fait preuve du même éclectisme dans le choix de ses sujets. Ses effets brillants et décoratifs resteront typiques de la dernière phase du Yamato-e.
Vers 1570, les guerres civiles rendent très précaire l'existence de l'école Tosa à Kyōto. Elle est obligée de fuir la capitale et s'installe dans le petit port de Sakai près d'Ōsaka. Après avoir perdu le patronage de la cour, Mitsuyoshi (1539-1613) et ses descendants survivent en faisant de minutieuses illustrations pour de riches marchands.
À l'époque de la grande peinture décorative, l'école Tosa connaît une période de déclin, mais elle se rétablit à Kyōto vers le milieu du xviie siècle et elle retrouve une certaine prospérité grâce au talent de Mitsuoki (1617-1691). Celui-ci reçoit le titre de chef de l'E-dokoro impérial, et ses héritiers le conserveront. Ainsi renouvelée, la tradition familiale se perpétuera jusqu'au xixe siècle. Mitsuoki est connu pour ses délicates peintures de fleurs et d'oiseaux où les caractéristiques du Yamato-e se mêlent à celles de certains peintres chinois de l'époque des Song du Sud. Ses successeurs ne sauront pas éviter un certain formalisme académique, et l'on ne peut découvrir dans leurs œuvres que des réminiscences affaiblies des beautés du passé.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Marie MATHELIN : attachée au musée Guimet
Classification
Autres références
-
EITOKU KANŌ (1543-1591)
- Écrit par Madeleine PAUL-DAVID
- 952 mots
...Ashikaga. Artiste éclectique, Motonobu avait su concilier l'emploi de la peinture à l'encre, à la mode chinoise, hérité de son père Masanobu, avec les couleurs vives de l'école Tosa, gardienne à la cour impériale des traditions du Yamato-e, la peinture nationale du Japon, élaborées au... -
JAPON (Arts et culture) - Les arts
- Écrit par François BERTHIER , François CHASLIN , Encyclopædia Universalis , Nicolas FIÉVÉ , Anne GOSSOT , Chantal KOZYREFF , Hervé LE GOFF , Françoise LEVAILLANT , Daisy LION-GOLDSCHMIDT , Shiori NAKAMA et Madeleine PAUL-DAVID
- 56 170 mots
- 35 médias
...d'oiseaux (kachō-e), style auquel Sesshū s'était initié au cours d'un bref séjour à Pékin. Certaines découvertes semblent indiquer que les Tosa, chefs de l'e-dokoro impérial, habitués aux couleurs précieuses du yamato-e, avaient été influencés par ce genre nouveau. Le mariage de Motonobu... -
MASANOBU KANŌ (1434-1530)
- Écrit par Madeleine PAUL-DAVID
- 1 396 mots
...fils Yoshitora (1465-1489) ainsi que celui de son protecteur Kikei et de son successeur Kisen Wajō, exécuté à sa demande quatre jours avant son décès. Or, ces portraits étaient traités dans le style officiel apparu à la cour impériale dès l'époque Kamakura (nise-e), ce qui semble indiquer une...