MÉDIÉVALES ÉCOLES
Dispensant l'enseignement en Occident, les écoles médiévales sont nées de l'obligation faite par Charlemagne, en 789, à tous les évêques et abbés d'ouvrir à l'ombre de leur église ou monastère une école où seraient enseignés la lecture, l'écriture, le comput liturgique et le chant, et où seraient poursuivies des études conduisant à une meilleure connaissance de la Bible et des Pères, ainsi qu'à une plus large diffusion des moyens élémentaires de l'administration. Dans l'esprit de Charlemagne et de son entourage (Alcuin, Théodulfe...), il s'agissait aussi d'assurer l'unité du royaume franc et de la chrétienté occidentale par l'unité de la culture et des rites.
Le morcellement politique de l'Europe à l'époque féodale (ixe-xiie s.) favorisa l'éclosion de nombreux centres intellectuels, qu'illustrèrent à la fois la renommée de leurs maîtres et la qualité de leurs productions artistiques, essentiellement les manuscrits recopiés dans leurs ateliers d'écriture (scriptoria). L'enseignement y respectait les programmes définis par les auteurs qui avaient assuré la transition entre l'Antiquité classique et le Moyen Âge chrétien, notamment au ve et au vie siècle, Martianus Capella et Boèce. La base de toute approche de la connaissance était constituée par les deux groupes d'arts libéraux : celui des moyens de la pensée, de la compréhension et de l'expression (trivium : grammaire, rhétorique et dialectique), et celui des moyens de la connaissance du monde (quadrivium : arithmétique, géométrie, astronomie et musique, cette dernière étant avant tout l'étude de l'harmonie des choses). C'est dans ce cadre qu'était étudiée la philosophie, gouvernée par la pensée platonicienne et par une connaissance limitée de l'aristotélisme. La découverte, à la fin du xiie et au début du xiiie siècle, de la métaphysique aristotélicienne bouleversa naturellement cet enseignement. Quant à la théologie, elle était souvent ramenée à une explication textuelle de l'Écriture, sous le triple aspect littéral et étymologique, symbolique, moral enfin.
Les écoles furent, jusqu'au xie siècle au moins, réservées aux clercs. Les monastères entretenaient parfois une double école : intérieure pour les oblats et les novices, extérieure pour les écoliers qui ne se destinaient pas à la vie régulière. Dans la plupart des cas, cependant, l'école conduisait directement au cloître. Cela explique le succès des écoles cathédrales auprès des jeunes gens dont la vocation ecclésiastique était moins forte. À partir de l'expansion économique et de l'essor urbain, et en même temps que le mouvement de revendication en faveur d'une autonomie de gouvernement — mouvement qui fut satisfait par les constitutions urbaines, les chartes de commune et les octrois de franchises —, se manifeste une tendance à la mise en œuvre d'institutions d'enseignement purement laïques, affranchies de l'Église quant à leurs moyens et à leurs fins. Les marchands, qui constituaient la nouvelle oligarchie, ressentaient la nécessité d'une instruction mieux appropriée aux besoins pratiques et créèrent, en bien des villes, des écoles municipales, qui furent surtout actives en Italie centrale et dans les grandes cités hanséatiques.
Parmi les très nombreuses écoles dont le rayonnement dépassa le cadre régional, les plus illustres furent, en France, les écoles épiscopales de Paris, de Chartres, de Reims, de Laon, et les écoles abbatiales du Bec en Normandie, de Saint-Victor et de Sainte-Geneviève à Paris. Certaines, comme celles de Corbie, de Saint-Martin de Tours ou de Saint-Martial de Limoges, brillèrent d'un vif éclat à l'époque carolingienne, mais perdirent ensuite leur renom. Celle de Chartres fut particulièrement[...]
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Écrit par
- Jean FAVIER : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France
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