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ÉCONOMIE (Histoire de la pensée économique) Marxisme

Le capital

À la différence de la plupart des économistes, Marx ne conçoit pas le capital comme une collection de biens. Il le définit comme suit : A – M – A', avec A' > A, où les tirets désignent des échanges, le M le capital sous forme de marchandise, et les A le capital sous forme d'argent, et où A et A' sont respectivement les montants d'argent qu'un capitaliste lance dans la circulation et en retire (livre I, tome I, chap. iv). Le capital est donc une entité qui passe périodiquement par les formes A et M, qui cherche à croître par ces changements de forme et qui mesure sa croissance par l'augmentation d'un montant d'argent. ΔA = A' — A est le profit et r = ΔA/A, le taux de profit.

Un capital a pour seul but d'accumuler et n'accorde aucun intérêt aux valeurs d'usage des marchandises. Il lance, à son tour, A' dans la circulation pour réaliser A' – M' – A'', avec A'' > A', et ainsi de suite. Un capital « n'a donc pas de limite » (livre I, tome I, chap. iv).

La définition du capital n'entretient pas de lien immédiat avec la valeur, la production et l'exploitation. Marx en établit un en affirmant que le profit ΔA doit correspondre à un surcroît de valeur, et en s'interrogeant sur la source de ce surcroît. Marx constate que, dans le schéma définitionnel : A – M – A', le surcroît ne peut pas venir de l'un des deux moments A – M et M – A', puisque ce sont des échanges, supposés se faire à valeur égale. Il en infère que le surcroît ne peut venir que du terme M. Puis il remarque que ce terme intègre en fait la production et que le schéma définitionnel complet est : A — P...M — A', où les points représentent la production et le P le capital sous forme productive, c'est-à-dire constitué d'éléments productifs.

Marx procède alors à l'analyse de ce schéma définitionnel complet. P recouvre deux sortes d'éléments productifs : des moyens de production (C) et des forces de travail (W), sa valeur est donc : P = C + W. Et, étant donné l'équation de la production, la valeur de M est : M = C + N. Pour qu'il y ait un surcroît de valeur, il faut que la valeur de M soit supérieure à celle de P :

M — P = (C + N) — (C + W) = N — W = Pl.

Ainsi, le surcroît de valeur correspondant au profit ΔA n'est rien d'autre que la plus-value. Et le taux de profit r = ΔA/A peut s'écrire :

À l'issue de cette analyse, le capital apparaît comme l'autre face du rapport de production caractéristique du capitalisme. Un capital ne peut fonctionner en tant que tel qu'en exploitant des travailleurs selon les modalités du salariat.

Marx nomme capital constant la fraction C du capital sous forme productive, car elle ne fait que transmettre sa valeur, et capital variable la fraction W, car c'est de cette fraction que provient une variation de la valeur, un surcroît de valeur. Et il nomme composition organique du capital le rapport C/W. Celle-ci est censée indiquer le niveau des forces productives : plus C/W est grand, plus la masse des moyens de production mise en œuvre par un travailleur est grande, plus la quantité de marchandises produite par un travailleur est grande, et plus la productivité du travail est donc élevée. Le taux de profit se réécrit :

Dès lors, ce taux paraît condenser la relation qui existe entre forces productives et rapports de production dans le capitalisme. C/W est l'indicateur du développement de ces forces dans ce mode. Et Pl/W l'expression du rapport de production au cœur de ce mode : le salariat.

Marx sait que le schéma définitionnel A – P...M – A' correspond au cycle du seul capital[...]

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Écrit par

  • : docteur d'État en sciences économiques, professeur des Universités

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Médias

Karl Marx - crédits : Courtesy of the trustees of the British Museum

Karl Marx

Les Temps modernes, C. Chaplin - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Les Temps modernes, C. Chaplin

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