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ÉCONOMIE (Histoire de la pensée économique) Théorie néo-classique

Après les révolutions de 1848 en Europe, l'économie politique qualifiée de classique par Karl Marx, celle de l'Écossais Adam Smith et de l'Anglais David Ricardo, doit affronter une double contestation. Celle des milieux conservateurs d'abord qui accusent les théories de Ricardo, en ayant associé à chaque facteur de production une classe sociale – la terre à la noblesse, le capital à la bourgeoisie, le travail au prolétariat – d'avoir nourri les théories sur la lutte des classes et les excès révolutionnaires. Celle des milieux progressistes ensuite qui accusent ces théories de légitimer, au travers de la défense de la concurrence, le maintien des salaires à un niveau qui assure juste la survie des ouvriers.

Menacée politiquement, l'économie politique constate également qu'elle s'enferre dans des impasses. L'explication des prix par la référence à la quantité de travail incorporée dans les biens produits – la théorie de la valeur travail que défend Ricardo – n'est pas satisfaisante. Les économistes prennent conscience de la nécessité de prolonger l'œuvre des classiques en changeant à la fois leurs méthodes et leur description de la réalité sociale.

Mathématique et axiomatique

En termes de méthode, l'économie politique cherche à acquérir le statut de science. Pour atteindre cette scientificité, elle adopte le formalisme mathématique qui donne à la physique son ossature. C'est l'aboutissement d'un processus déjà engagé au début du xixe siècle. En 1840, l'économiste allemand Johann Heinrich von Thünen (1783-1850) dérive une fonction pour arriver à une formule donnant, selon lui, le niveau de salaire optimal. Mais l'économiste qui assoit véritablement l'usage des mathématiques en économie est le Français Antoine Augustin Cournot (1801-1877). Ce normalien mathématicien traduit les idées de Ricardo en formules mathématiques, puis utilise des mathématiques pour développer ses propres théories. Il assimile l'entreprise à une fonction mathématique de la quantité produite mettant en relation le profit avec le coût et le prix. Il en décrit le fonctionnement en recourant à la dérivation de cette fonction. Il est aussi le premier à substituer la dénomination de science économique à celle d'économie politique.

L'usage des mathématiques, non seulement par la statistique qui permet de décrire la réalité sociale ambiante, mais également par le recours systématique à des équations fixant des relations fonctionnelles entre les paramètres de l'économie, comme la consommation, le revenu, l'épargne ou l'investissement, devient ainsi l'élément indispensable à l'expression des théories économiques.

L'économie néoclassique s'affirme après 1870. C'est Thorstein Veblen (1857-1929), un économiste américain d'origine scandinave, qui la qualifie de néoclassique pour en dénoncer à la fois le caractère peu imaginatif et la prétention à dominer toute production économique théorique. On considère que le premier économiste néoclassique est l'Anglais William Stanley Jevons (1835-1882) qui publie en 1871 une Théorie de l'économie politique qui est le premier texte vraiment néoclassique. Mais les trois plus importants initiateurs en sont le Français Léon Walras (1834-1910), qui enseigne à Lausanne, l'Anglais Alfred Marshall (1842-1924), enseignant à Cambridge, et l'Autrichien Carl Menger (1840-1921), fondateur de ce que l'on appelle l'école autrichienne.

William Stanley Jevons - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

William Stanley Jevons

Carl Menger - crédits : AKG-images

Carl Menger

Ayant adopté les mathématiques comme langage, l'économiste néoclassique construit son raisonnement selon la méthode scientifique usuelle qui se déroule en trois étapes :

– l'identification des acteurs de l'économie et des paramètres qui caractérisent leurs actions ;

– la formulation[...]

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William Stanley Jevons - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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Carl Menger - crédits : AKG-images

Carl Menger

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