- 1. Une situation plutôt favorable
- 2. La nouvelle crise pétrolière
- 3. L'anémie des grandes monnaies
- 4. Commerce international : le dernier round de l'Uruguay ?
- 5. Le risque d'un Pearl Harbour industriel
- 6. Matières premières : l'atonie persistante
- 7. Tiers Monde : la rechute pour cause de pétrole ?
- 8. Le triomphe modeste du moins mauvais des mondes
ÉCONOMIE MONDIALE 1990 : de l'euphorie à la crainte
La nouvelle crise pétrolière
Tel était le climat lorsque éclata brutalement, le 2 août 1990, la nouvelle crise du Moyen-Orient ; l'annexion du Koweït par l'Irak et l'état de guerre qui s'ensuivit devaient profondément secouer l'univers, sans que l'on pût, sur le moment, en évaluer toutes les conséquences, ni même estimer l'ampleur véritable du séisme.
Il était clair toutefois que le climat d'euphorie du premier semestre était vite oublié : les États-Unis se lançaient dans un effort de guerre sans précédent depuis la Corée et l'Indochine et les Bourses mondiales enregistraient une chute qui rappelait le krach d'octobre 1987. Le prix du baril de pétrole augmentait très vite de près de 30 p. 100 et des inquiétudes se manifestaient quant à la pérennité des approvisionnements pétroliers dans le moyen terme. L'élan des investisseurs semblait brisé, ne serait-ce que par l'anéantissement des espoirs concernant la baisse des taux d'intérêt, amorcée timidement au début de l'été.
Par la faute d'un dictateur irakien pratiquant la prise d'otages à grande échelle, le monde entrait à nouveau dans une phase de fortes turbulences, dont personne n'était capable de prédire l'ampleur ni la durée. L'ébranlement était profond, risquant même d'introduire de nouveaux désaccords entre Européens.
Reste qu'une page essentielle était tournée et que s'offraient, par-delà les circonstances angoissantes du moment, de solides motifs d'espérance. En effet, pour la première fois, l'O.N.U. jouait véritablement son rôle, en décidant à l'unanimité l'embargo contre l'agresseur irakien. Pour la première fois également, l'Union soviétique adoptait, dans le concert des nations, une attitude constructive. Un dialogue confiant était rétabli entre les deux Grands, le Royaume-Uni et la France apportant leur contribution à la consolidation de ce climat nouveau comme à la protection des pays modérés du Moyen-Orient. Enfin, les économies industrialisées paraissaient beaucoup moins vulnérables à cette crise pétrolière qu'elles ne l'avaient été lors des deux premiers chocs ; la situation était d'ailleurs si différente que la plupart des observateurs s'accordaient pour refuser de la considérer, sauf accident majeur, comme un « troisième choc pétrolier ».
L'expérience des quinze dernières années est, en effet, plutôt rassurante : malgré les deux chocs pétroliers, les pays industrialisés n'ont-ils pas accru leur richesse, dans l'ensemble, de plus de 25 p 100 ? Beaucoup moins dépendantes du pétrole qu'elles ne l'étaient quinze années plus tôt, les économies occidentale et japonaise affrontaient en outre cette nouvelle crise dans un contexte beaucoup plus sain : tendances inflationnistes mieux maîtrisées, activité industrielle modérée, stabilité mieux assurée des marchés financiers grâce notamment aux progrès de la concertation internationale.
Celle-ci devait se prolonger, comme en chaque début d'automne, par les réunions du F.M.I. à Washington, où les ministres procédaient à leurs discussions habituelles dans un climat d'attentisme inquiet, redoutant à la fois l'inflation et la récession sur les marchés financiers : la rentrée s'est en effet accomplie sous le signe d'une faiblesse persistante du dollar, jugée excessive et dangereuse, même si elle allège pour l'Europe les effets pernicieux de la hausse du prix du pétrole. De leur côté, les pays membres de la Communauté européenne avaient à préparer l'étape décisive qu'ils se sont fixée, à savoir les deux conférences intergouvernementales, l'une sur l'union monétaire, convoquée pour le 14 décembre, et l'autre sur l'union politique, convoquée pour le 15 décembre.[...]
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Écrit par
- Régis PARANQUE : directeur de cabinet du président du Conseil économique et social.
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