- 1. Une situation plutôt favorable
- 2. La nouvelle crise pétrolière
- 3. L'anémie des grandes monnaies
- 4. Commerce international : le dernier round de l'Uruguay ?
- 5. Le risque d'un Pearl Harbour industriel
- 6. Matières premières : l'atonie persistante
- 7. Tiers Monde : la rechute pour cause de pétrole ?
- 8. Le triomphe modeste du moins mauvais des mondes
ÉCONOMIE MONDIALE 1990 : de l'euphorie à la crainte
Tiers Monde : la rechute pour cause de pétrole ?
Plus d'un milliard d'êtres humains vivent avec un revenu annuel inférieur à 370 dollars, c'est-à-dire au-dessous du seuil dit de pauvreté. Telle est la réalité constatée par la Banque mondiale en 1990 dans son Rapport sur le développement dans le monde.
Malgré les bons résultats économiques enregistrés par de nombreux pays dans la décennie de 1980, la pauvreté n'a pas régressé. C'est l'Asie du Sud qui détient le record, avec près de la moitié de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté ; la majorité des pauvres vivent dans les zones rurales (77 p. 100 en Inde, 80 p. 100 au Kenya), et l'agriculture reste leur principale source de revenu. Toutefois, la pauvreté urbaine progresse, surtout dans les bidonvilles d'Amérique latine, au Venezuela, au Mexique et au Brésil.
La démographie pèse lourd dans toutes les régions du Sud où règne la pauvreté : elle absorbe généralement, et au-delà, les gains de la croissance économique.
La Banque mondiale souligne la position particulièrement défavorisée des femmes, qui « se heurtent à toutes sortes d'obstacles d'ordre culturel, social, juridique et économique, que les hommes, même quand ils sont pauvres, ne connaissent pas ». Le taux d'alphabétisation des femmes en Asie du Sud ne représente, par exemple, que la moitié de celui des hommes ; dans les zones rurales du Pakistan, 20 p. 100 seulement des filles vont à l'école primaire. Enfin, la Banque mondiale rappelle l'interdépendance économique entre Nord et Sud et met en garde contre « le danger que représente la persistance d'un faible taux d'épargne, qui ralentirait le taux de croissance du monde industriel d'environ 0,5 p. 100 et alourdirait la charge de la dette en maintenant des taux d'intérêt élevés ».
Sur ce plan aussi, l'année 1990 n'avait pourtant pas trop mal commencé. Le rapport annuel de l'O.C.D.E. révélait en effet que la dette globale du Tiers Monde avait cessé de croître. Atteignant un total de 1 322 milliards de dollars, elle semblait appelée à revenir, selon l'O.C.D.E., à son niveau de 1987. En outre, les pays en développement avaient reçu des concours financiers en lente progression, ce qui contrastait avec la chute brutale que l'on avait constatée à cet égard dans la première moitié des années 1980.
C'est l'aide publique qui était la première cause de ce léger redressement, à quoi s'ajoutait le fait que les crédits à l'exportation étaient redevenus positifs pour la première fois depuis 1985.
Mais l'inquiétude demeurait, du fait notamment de la persistance de taux d'intérêt élevés : le financement des investissements tant dans les pays industrialisés qu'en Europe de l'Est ne devait-il pas entraîner des besoins considérables en capitaux qui continueraient à pousser les taux d'intérêt à la hausse ? La charge des intérêts et dividendes supportée par les pays en développement serait donc amenée à s'alourdir.
Élément plus positif, le « plan Brady » constitue un progrès dans la stratégie internationale de la dette : il apporte un soutien officiel, tant moral que financier, aux opérations de réduction de la dette des pays à revenu intermédiaire lourdement endettés qui, notamment en Amérique latine, ont entrepris des efforts résolus dans ce domaine.
Sur le continent sud-américain, en effet, les nouveaux présidents d'Argentine (Carlos Menem), du Brésil (Fernando Collor), du Pérou (Alberto Fujimori) se sont hardiment lancés dans des programmes d'assainissement rigoureux, parfois brutaux, de leurs économies nationales respectives. Restait à savoir si les conséquences sociales et politiques de ces programmes seraient durablement supportées par des populations déjà très pauvres et « travaillées[...]
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Écrit par
- Régis PARANQUE : directeur de cabinet du président du Conseil économique et social.
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