- 1. Un cycle économique atypique
- 2. Les pesanteurs du désendettement
- 3. Vers un retour à Keynes ?
- 4. Le combat pour l'union monétaire
- 5. Les suites de Maastricht
- 6. Les pays de l'Est au plus profond de la crise
- 7. Une communauté de « proches étrangers »
- 8. L'exubérance de l'Asie
- 9. L'Afrique affectée par la sécheresse et le surpeuplement
- 10. Difficile intégration en Amérique latine
ÉCONOMIE MONDIALE 1992 : vers un nouveau modèle de croissance?
L'évaluation pour 1992 de la croissance économique dans le monde a donné lieu, au fil des mois, à plusieurs révisions en baisse. Aux déceptions et inquiétudes suscitées par ces ajustements s'est ajouté un certain malaise : il devenait évident que les modèles de croissance sur lesquels se fondaient les prévisions n'étaient plus fiables. La remise en cause portait autant sur l'analyse de la situation que sur les remèdes destinés à la redresser.
Ce constat concernait au premier chef les pays industrialisés, dont le Tiers Monde attendait toujours un regain d'activité pour atténuer ses propres difficultés. La situation de ce dernier présentait toutefois d'importants écarts. La sensible amélioration en Amérique latine contrastait avec la dérive de l'Afrique subsaharienne ; le dynamisme des « dragons » du Sud-Est asiatique ne se démentait pas, alors que le sous-continent indien ne progressait guère dans la lutte contre sa pauvreté. Quant aux pays de l'Europe de l'Est, l'aggravation des conditions de vie, en particulier dans les nouvelles républiques indépendantes de l'ex-U.R.S.S., s'est accompagnée d'un sujet d'espoir, celui d'avoir dépassé le creux de la vague.
À l'occasion de son assemblée annuelle, en septembre 1991, le Fonds monétaire international (F.M.I.) avait prévu pour l'économie mondiale une croissance de 1,75 p. 100 en 1992. Le rapport publié en vue de la réunion du Comité intérimaire, en avril, ne faisait plus état que de 1 p. 100. À la veille de Noël, fait exceptionnel, l'institution revenait à nouveau sur son pronostic, évaluant cette fois la croissance mondiale à 0,8 p. 100. Le recul était signalé pour tous les principaux pays – à l'exception notable des États-Unis, qui ont fait l'objet d'une révision en hausse – et groupes de pays. Les experts du F.M.I. percevaient toutefois, en matière d'inflation, une amélioration dans les pays industrialisés et en Europe de l'Est (ex-U.R.S.S. comprise).
Le marasme persistant a aggravé les déceptions entretenues par deux années de faux espoirs : à la fin de 1991, on avait cru discerner les signes tangibles d'une reprise prochaine. Le plus probant d'entre eux était la sensible amélioration de la conjoncture américaine au second semestre. La tendance s'est effectivement affirmée très nettement au premier trimestre de 1992, l'Europe suivant cette fois l'orientation des États-Unis. Il a bientôt fallu déchanter avec, au printemps, un phénomène de décélération générale, particulièrement marquée en Allemagne. Il ne restait plus, au dernier trimestre, que l'encouragement d'une nouvelle remontée en puissance de l'économie américaine dans l'anticipation d'une victoire de Bill Clinton à l'élection présidentielle en novembre. Le programme économique du gouverneur de l'Arkansas apportait en effet, en dépit de ses imprécisions, l'espoir de renouer avec la croissance. Il entendait y pourvoir par un recours massif à l'investissement public. Les prescriptions héritées des années 1980 avaient fait la preuve de leur inefficacité. Le changement de cap qui s'annonçait à Washington avait aussi ses partisans en Europe.
Un cycle économique atypique
La longueur inhabituelle du ralentissement économique a contribué à entretenir une attitude attentiste de la part des consommateurs, ce qui ne pouvait que se répercuter sur les décisions d'investissement. Depuis la dernière guerre, la durée des récessions a été généralement inférieure à un an ; celle qui est apparue aux États-Unis au début de la crise du Golfe aura, à la fin du troisième trimestre 1992, duré plus de deux ans. Toujours depuis le Seconde Guerre mondiale, la durée moyenne des périodes d'expansion a été de plus de trois ans, et la dernière fut particulièrement[...]
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Écrit par
- Tristan DOELNITZ : journaliste économique et financier
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