ÉCONOMIE MONDIALE 1996 : sur la voie de la convergence
Asie : les champions s'essoufflent
Après trois années de croissance lente et hésitante, la reprise économique amorcée au Japon au cours du second semestre de 1995 s'est nettement affirmée au début de 1996. Le principal facteur en a été le plan de relance de 14 220 milliards de yen annoncé par le gouvernement en septembre 1995. Il s'y est ajouté un redémarrage de l'investissement fixe des grandes entreprises ainsi qu'une forte augmentation des dépenses des ménages, en début d'année, à la faveur d'une vive progression de leurs revenus. Le très faible niveau des taux d'intérêt a stimulé l'activité, en particulier dans le domaine de la construction de logements, et aidé les banques à assainir leurs bilans. La croissance du P.I.B. en 1996 a été estimée à 3,6 p. 100, contre 0,9 p. 100 en 1995.
L'affaiblissement du yen a contribué à la reprise. En novembre, il avait effacé vis-à-vis du dollar la quasi-totalité de l'appréciation enregistrée depuis le premier semestre de 1993. Après un nouveau tassement au premier semestre (— 1,4 p. 100), les exportations ont augmenté de 7,5 p. 100 dans la seconde moitié de l'année.
Les autorités japonaises ont évité une nouvelle crise financière qui menaçait cette fois les jusen, sociétés de prêts au logement dont les actifs, s'élevant à 13 000 milliards de yen, étaient composés en majeure partie de prêts difficilement recouvrables. L'État et les institutions financières ont assumé la moitié de ces obligations et les actifs des jusen qui ont été liquidés ont été repris par un organisme public créé sur le même modèle que la Resolution Trust Corp. qui avait permis de solder, à partir de 1989, la crise des savings and loan aux États-Unis.
La hausse des prix à l'exportation et le bas niveau des taux d'intérêt ont contribué à une remontée des bénéfices des sociétés japonaises. La firme de courtage Nomura a évalué à 8,5 p. 100 la progression pour les trois cent cinquante premières sociétés industrielles. La hausse avait atteint 21,6 p. 100 en 1995, alors que la conjoncture était nettement moins favorable. Ce paradoxe s'explique par le fait que les dirigeants des grandes entreprises avaient alors estimé que la crise économique justifiait des entorses au principe de l'emploi à vie, réduisant ainsi leurs charges salariales, ce que la reprise en 1996 ne permettait plus. Le taux de chômage s'est maintenu aux environs de 3,3 p. 100, mais les sociétés industrielles, dans bien des cas, ont continué à investir à l'étranger plutôt que de créer de nouveaux emplois dans l'archipel. Cette tendance s'appuyait aussi sur la décélération à long terme des gains de productivité : sur la période des vingt années précédentes, ils sont revenus de 3 p. 100 par an à 0,6 p. 100
La préoccupation immédiate du gouvernement a été de maintenir l'élan de la reprise tout en mettant un terme à la politique de relance par les crédits publics. Cette dernière s'est soldée par un déficit des administrations publiques équivalent à 3,3 p. 100 du P.I.B. en 1995 à 4,1 p. 100 en 1996. Plusieurs mesures devaient être mises en œuvre en vue du retour à l'équilibre : suppression de la réduction temporaire de l'impôt sur le revenu, augmentation de 3 à 5 p. 100 (en avril 1997) de l'impôt sur la consommation et relèvement de 16,5 à 17,35 p. 100 des cotisations patronales et salariales au régime d'assurance-retraite des salariés.
La reprise demeurant hésitante, il n'était pas question de relever les taux d'intérêt. Le taux d'escompte a été maintenu à 0,5 p. 100, niveau historiquement bas qui était le sien depuis septembre 1995. Les ménages n'ont que peu profité de la politique de relance axée sur les travaux publics. La hausse de leurs revenus disponibles a été évaluée[...]
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Écrit par
- Tristan DOELNITZ : journaliste économique et financier
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